Communautés savantes et communautés scientifiques

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Loin de l’érudit terré dans son laboratoire, le chercheur construit la connaissance scientifique au sein d’une communauté, plus que jamais stratégique.

I. La communauté, socle de la connaissance scientifique

1)  La communauté scientifique, garante de la validité du savoir

La construction de la connaissance scientifique exige de se référer à des pairs qui légitiment les travaux de recherche par leur évaluation au sein de comités de lecture lors de leur communication.

Les chercheurs ont donc besoin d’une communauté scientifique, ensemble des savants experts dans leur domaine, pour enrichir leur champ de recherche, notamment par la confrontation des regards et la controverse.

La communauté savante associe les experts aux amateurs : la population se forme grâce aux scientifiques mais a également un rôle de construction et de diffusion du savoir.

2)  Communautés scientifiques et savantes dans l’histoire

Les communautés de scientifiques sont liées à l’essor des sciences dès ­l’Antiquité. À Alexandrie au IIIe siècle av. J.-C., Ptolémée Ier fait construire un Musée pour ­réunir les meilleurs chercheurs. À Bagdad au IXe siècle, ils sont réunis par le calife Al-Mamun dans la Maison de la Sagesse pour échanger leurs savoirs et leur permettre d’accéder aux livres traduits, notamment du grec.

Mais plus la recherche se spécialise, à partir du XVIIe siècle, plus une communauté savante émerge pour faciliter la diffusion des connaissances entre institutions (académies, universités) et lieux de savoir (laboratoires), entre grands centres mondiaux et nouveaux pôles scientifiques.

L’État assure un rôle primordial pour la communauté scientifique, par son financement, sa protection ou son contrôle. Selon les époques et les régimes, il favorise plus ou moins la science ou la censure. Le rôle des communautés de savants est également d’aider les scientifiques à échapper aux pressions, à l’image d’une République des Lettres.

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Dans l’Italie du XVe siècle naît la République des Lettres, idéal de collaboration libre et désintéressée entre érudits engagés dans l’échange de savoirs, qui permettait aux savants d’échapper, au moins en théorie, au contrôle de l’Église.

II. Enjeux et défis de la communauté scientifique

1)  Une communauté entre coopération et concurrence

La recherche est tiraillée entre un idéal de partage universel du savoir  et les ambitions des chercheurs, de leurs laboratoires et des États qui les financent, créant de la concurrence.

La production de connaissance est parfois source de conflits entre États (guerres des brevets, récupération des compétences), y compris au prix d’espionnage scientifique et industriel .

2)  Les nouveaux défis de la communauté scientifique

Les savoirs scientifiques sont au cœur de la hiérarchie économique et politique des États, notamment par leur poids dans la richesse des pays. La mondialisation renforce l’âpreté de la compétition internationale, notamment entre les pays développés ou avec les pays émergents qui les défient.

La société de la connaissance place la science au cœur des intérêts : ­émancipée du pouvoir religieux et politique, celle-ci risque de retomber sous l’influence du pouvoir économique. Le défi est donc de réfléchir au rôle et aux responsabilités de la communauté scientifique et à son indépendance.

La communauté scientifique étend son réseau dans le cyberespace . Mais cette science-monde tend à se diluer : Internet est à la fois un idéal de ­communauté savante universelle et un univers anarchique du savoir.