Après 40 ans d’une croissance économique exceptionnelle, la Chine commence à en percevoir les dividendes géopolitiques. Elle s’affirme comme une grande puissance, moins dans ses discours que dans les investissements de souveraineté qu’elle réalise dans les domaines maritime et spatial.
I. L’affirmation de la Chine comme grande puissance
1 ) Des discours mesurés…
Après le « siècle de la honte » (1842-1949), durant lequel la Chine fut dominée par les puissances coloniales européennes, le pays retrouve peu à peu le rang qui était le sien.
Si le discours officiel chinois continue de se défendre d’une volonté de puissance de niveau mondial, ses actes donnent une tout autre image. Déjà, le consensus de Pékin s’affirme comme un modèle alternatif.
Info
Le consensus de Pékin est un modèle de relations bilatérales qui propose une aide au développement sans condition politique, en particulier démocratique, ce qui en fait le modèle favori de tous les dictateurs de la planète.
L’extraordinaire croissance, depuis quarante ans, du PIB chinois lui donne aujourd’hui les moyens de son affirmation.
2 ) … mais une lutte pour l’hégémonie mondiale
Une lutte géopolitique s’annonce entre les États-Unis et la Chine, dont les manifestations s’expriment dans les domaines spatial et océanique.
Le « rêve chinois » tant vanté par le président Xi Jinping n’est-il pas celui, prévu pour 2049 – le centenaire de la République populaire – de la domination mondiale ?
II. Nouveaux investissements, nouvelles appropriations
1) Des objectifs géostratégiques et géoéconomiques
Les objectifs stratégiques chinois dans le domaine océanique sont d’abord géoéconomiques : sécurisation des routes maritimes d’approvisionnement en énergie et matières premières, mais aussi d’exportation des produits manufacturés qui font du pays « l’usine du monde » et dont dépend la croissance (stratégie du « collier de perles » dans l’océan Indien ).
Les objectifs sont aussi géopolitiques : revendiquer le contrôle des « mers proches » (mers de Chine orientale et méridionale), briser le confinement de la « première chaîne d’îles » (Japon, Taïwan, Philippines, Bornéo) contrôlée par les Américains, accéder au-delà de la deuxième chaîne d’îles (Mariannes, Guam) à une capacité de projection globale : en 2017, la Chine a ainsi ouvert sa première base militaire à l’étranger, à Djibouti.
2) Des moyens navals considérables
Entre 2014 et 2018, la Chine a mis à l’eau l’équivalent de la totalité de la puissance navale britannique.
Symboles de la puissance navale et de la capacité de projection mondiale, les porte-avions chinois sont déjà au nombre de deux : le Liaoning, discrètement racheté à l’Ukraine puis rééquipé, et le Shandong, premier porte-avions entièrement construit en Chine et lancé en 2019. Deux autres sont en construction.
Les progrès sont significatifs et le budget pour les armes nouvelles (missiles hypersoniques, canons électromagnétiques) en plein essor.
3) Des ambitions spatiales affirmées
Le budget spatial chinois, bien qu’opaque, est estimé à 11 milliards de dollars, presque quatre fois le budget russe ! En 2019, la Chine a effectué 34 lancements, contre 22 pour la Russie et 21 pour les États-Unis.
Significativement, la coopération avec les autres puissances en matière spatiale est très faible, notamment du fait des États-Unis.