Œuvre clé - Sigmund Freud, Sur le rêve

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Publié en 1901, Über den Traum offre un résumé très accessible de L’Interprétation du rêve (1900). Dépassant la question du rêve, Freud y promeut la psychanalyse comme moyen de mieux se connaître.

I. L’énigme des rêves

1) La clé des songes

Le contenu des rêves est souvent confus voire absurde. Mais les humains n’ont​ jamais renoncé à en trouver le sens caché, à l’image des Anciens qui y voyaient des messages divins ou des présages (chap. 1). 

À l’aube du XXe siècle, Freud en propose une explication sur la base d’une discipline dont il est l’inventeur : la psychanalyse. Définie comme une « psychologie des profondeurs », elle dévoile les mécanismes inconscients de notre esprit et propose sur cette base une pratique thérapeutique.

2) Rêve et désir

 Le rêve satisfait des désirs (chap. 9) et constitue en ce sens le « gardien du sommeil » contre les excitations qui pourraient le perturber (chap. 11). Son contenu est énigmatique lorsque le désir ne peut pas s’y présenter comme tel parce qu’il est refoulé : censuré car interdit ou honteux, il serait susceptible de provoquer le réveil s’il apparaissait en toute clarté au rêveur. 

Ainsi, une jeune femme raconte avoir vu en rêve le second enfant de sa sœur mort dans son berceau. L’analyse révèle qu’une scène analogue a déjà été vécue lors de la mort du premier enfant, or ce drame avait été l’occasion d’un rapprochement avec l’homme qui lui est interdit mais qu’elle ne peut s’empêcher d’aimer. La mise au premier plan de l’événement tragique dans le rêve a parfaitement masqué la réalisation du désir.

Citation

« Le rêve doit être obscur pour ne pas trahir les pensées du rêve honnies. »

Le refoulement par lequel des pensées sont repoussées et maintenues en dehors de la conscience n’est possible que par un effort permanent. Son relâchement pendant le sommeil est propice à une baisse de la censure et au retour de ces pensées sous une forme déguisée. C’est pourquoi Freud parle du rêve comme d’une « formation de compromis » (chap. 10).

Citation

« Refoulement – baisse de la censure – formation de compromis, c’est là le schéma fondamental de la genèse de très nombreuses autres formations psychopathologiques, où les choses se passent de la même façon que dans le rêve. »

II. L’interprétation des rêves

1) La psychanalyse à l’œuvre

La méthode des « libres associations » permet d’interpréter les rêves. Elle consiste à dire tout ce qui vient à l’esprit, sans restriction ni censure, en partant d’un élément du rêve. Les chaînes associatives formées permettent alors de remonter à l’inconscient du rêveur (chap. 2). Ce travail d’interprétation permet de mieux comprendre qui nous sommes et ce que nous désirons. 

Freud schématise le fonctionnement de l’esprit avec sa « première topique » (chap. 10). Celle-ci distingue la conscience (dont les contenus sont immédiatement accessibles), le préconscient (accessible par un effort de concentration ou de mémoire) et l’inconscient (séparé du reste de l’esprit par la barrière du refoulement).

Citation

« L’interprétation des rêves est la voie royale qui mène à la connaissance de l’inconscient dans la vie psychique. »

2) Le travail du rêve

 À l’inverse du travail d’interprétation qui dévoile le « contenu latent », le travail du rêve élabore un « contenu manifeste » (chap. 8) qui en cache le sens. Certes la dramatisation met en scène le désir (chap. 3) ; mais la condensation concentre sur un seul élément différentes significations (chap. 4), le déplacement crée des leurres (chap. 5), la figuration rend visibles connexions logiques et concepts abstraits (chap. 6), l’élaboration secondaire peaufine le scénario du rêve en lui donnant une belle façade (chap. 7). 

Il est vain de constituer un dictionnaire des rêves : même si certains symboles sont communs au sein d’une même aire culturelle et se retrouvent, par exemple, dans la littérature ou le folklore (chap. 12), les éléments du rêve sont toujours propres au rêveur et ne peuvent être interprétés que par lui.

Le rêve du prisonnier 

Freud voit dans ce tableau une illustration de la fonction biologique du rêve (Introduction à la psychanalyse, 1916-1917). Perturbé lors de sa sieste par un rayon de soleil, le prisonnier réagit par la production d’un scénario d’évasion où le trouble extérieur vient s’insérer dans la trame de son désir le plus cher : ne plus dormir « à l’ombre » ! (Moritz von Schwind, Le Rêve du prisonnier (1836))