Mers et océans sont des territoires où s’affirment les puissances maritimes et où s’expriment leurs rivalités. L’océan Indien et la mer Méditerranée révèlent particulièrement les recompositions géopolitiques du monde du XXIe siècle.
I. Une zone stratégique : l’océan Indien
1) Contrôler les routes maritimes
L’océan Indien constitue l’un des « ventricules du commerce international ». Sur cet « océan de transit » se croisent les routes maritimes commerciales qui connectent l’Asie orientale à l’Europe, via la route du Cap ou celle du canal de Suez. C’est également « l’autoroute des hydrocarbures ». Or, cet océan n’est connecté aux autres mers et océans que par quatre passages hautement stratégiques.
Chiffre clé
70 % des hydrocarbures du Moyen-Orient sont acheminés vers la Chine, le Japon, la Corée du Sud et Taïwan.
2) Assurer la liberté de navigation
Les Ve et VIIe flottes américaines, permanentes, basées à Bahreïn et à Singapour, contrôlent de près les détroits d’Ormuz et de Malacca, et assurent la liberté de navigation. Elles pourraient aussi, en cas de besoin, frapper l’Iran ou couper l’approvisionnement de la Chine en pétrole.
La France est la 2e puissance navale de rang mondial dans la zone. Elle bénéficie de sa présence territoriale à La Réunion et à Mayotte, mais aussi de ses bases de Djibouti et d’Abu Dhabi. Les forces navales et aériennes françaises assurent la liberté de navigation, la sécurité des territoires ultramarins et de leur ZEE, ainsi que la lutte contre la piraterie dans la corne de l’Afrique.
3 ) L’irruption des puissances émergentes
La montée en puissance de la marine de guerre chinoise bouleverse les données géostratégiques. La Chine dépend en effet des routes maritimes pour ses exportations vers l’Europe (400 Mds €) et ses importations d’hydrocarbures en provenance du golfe Persique (90 % de sa consommation).
Aussi la Chine a-t-elle développé un réseau de points d’ancrages et de facilités navales, baptisé le « collier de perles ». En 2017, elle a créé sa première base outre-mer, à Djibouti, à côté des bases française et américaine.
L’Inde s’inquiète du déploiement de la puissance chinoise, qu’elle assimile à un encerclement régional. Elle multiplie les accords de défense et les installations de surveillance (îles Andaman). L’Indian Navy se développe .
II. Une zone instable : la mer Méditerranée
La Méditerranée est parcourue de flux considérables : Suez et Gibraltar sont les portes d’entrée qui connectent l’Europe au Moyen-Orient et à l’Asie. Anciens et nouveaux acteurs régionaux et mondiaux (non riverains) tentent d’y affirmer leur puissance ou leur souveraineté.
Les pays riverains connaissent de fortes tensions avec la découverte de gisements d’hydrocarbures dans des ZEE mal définies (Israël/Liban ou Chypre/Turquie). Les contentieux anciens ne sont pas réglés, notamment entre la Grèce et la Turquie : en 2018, les violations turques des eaux territoriales grecques ont quintuplé.
La Chine, nouvelle arrivée, développe ses points d’appui en Algérie (El-Hamdania), en Grèce (Le Pirée), en Égypte (Port-Saïd). La Russie profite de la guerre en Syrie pour restaurer son influence en Méditerranée orientale (facilités à Chypre et base syrienne de Tartous).
Info
Depuis l’entrée du Monténégro dans l’OTAN en 2017, l’OTAN contrôle tout le littoral nord‑méditerranéen. La base de Tartous constituait alors l’unique accès russe à la Méditerranée.
La France constitue un acteur clé. La base de Toulon, port d’attache du groupe aéronaval du porte-avions Charles-de-Gaulle, est le premier port militaire français. Le « Charles » a été engagé contre Daech en Syrie et en Irak.
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Les rivalités de puissance dans l’océan Indien