Le XXe siècle remet en question les fondements et les codes du roman : le traitement de l’intrigue et du personnage romanesque est renouvelé.
I. Un renouveau
1) Repenser le roman
La vision subjective et le monologue intérieur renouvellent la forme du récit. Dans À la Recherche du temps perdu (1913-1927) de Marcel Proust, le personnage et son destin cèdent la place à un « je » intériorisé.
Certains auteurs interrogent la forme même du roman. Ainsi, dans Les Faux-monnayeurs (1925), André Gide met en abyme le travail de l’écrivain par une construction complexe faite d’emboîtements d’intrigues et d’une multiplicité de points de vue.
2) Interroger le sens de l’existence
Les romans prenant pour thème les deux Guerres mondiales révèlent un homme englué dans des événements qu’il ne maîtrise pas : c’est le cas de Bardamu chez Céline (Voyage au bout de la nuit, 1932).
L’homme dans toute sa détresse et le héros démythifié se rejoignent dans les personnages clochardisés de Beckett (Molloy, 1951), incapables d’action dans un monde dénué de sens.
Si les romans de Camus, L’Étranger (1942) et de Sartre, La Nausée (1938), sont porteurs du sentiment de l’absurde, d’autres s’interrogent sur la portée de l’engagement de l’homme dans le monde, comme La Condition humaine (Malraux 1933) ou La Peste (Camus 1947).
II. Des expérimentations
1) Le Nouveau Roman
Dans les années 1950-1970, le Nouveau Roman veut se détacher de la représentation du réel et remet en cause les codes du roman.
Sarraute (L’Ère du soupçon, 1956) refuse l’effet « trompe-l’œil », qui, sous prétexte de vouloir rendre le réel, détourne le lecteur de la « vérité profonde » de l’être.
Robbe-Grillet (Pour un nouveau roman, 1963) refuse le personnage traditionnel et toute utilisation du réel comme support d’une intrigue.
Michel Butor (L’Emploi du temps, 1956) se joue de la chronologie par de constants allers et retours entre le passé et le présent.
2) L’influence du surréalisme et de l’Oulipo
La vision surréaliste et le jeu avec les contraintes de l’Oulipo vivifient la création romanesque. André Breton (Nadja, 1928), Queneau (Zazie dans le métro, 1959), Boris Vian (L’Écume des jours, 1947), poétisent le réel et se jouent des mots et de la langue. Perec se donne comme contrainte d’écrire un récit de 300 pages (La disparition, 1969) sans utiliser la lettre e.
III. Le mélange de genres
L’écriture autobiographique reparaît mais dans des formes renouvelées : Nathalie Sarraute (Enfance, 1983) l’écrit sous forme de dialogue avec elle-même ; Georges Perec, (W ou le souvenir d’enfance, 1975) alterne une fiction écrite lors de son adolescence et le récit de son enfance écrit au présent.
L’autofiction, hybride de roman et d’autobiographie, utilise la fiction pour accéder à la connaissance de soi. De nombreux auteurs s’y essaient, parmi lesquels Modiano avec Dora Bruder (1997).
Citation
« Depuis dix ans, on ne cesse de m’interroger sur la part de fiction qui entre dans mes livres. Or cette part de fiction, elle est nulle. » (Emmanuel Carrère)
La « non-fiction narrative » tient à la fois du reportage, du documentaire et du récit romancé. L’Adversaire (1993), d’Emmanuel Carrère, récit d’un sinistre fait divers et du parcours de l’écrivain pour essayer de comprendre le criminel, en est un bon exemple.