Pour aller plus loin : le raisonnement par récurrence en arithmétique

icône de pdf
Signaler

I- Introduction

Le raisonnement par récurrence est utilisé pour montrer des résultats faisant intervenir une variable entière de l'ensemble N\mathbb{N} ou d'une partie de cet ensemble, comme par exemple N\mathbb{N}^{}, N{1,2}\mathbb{N}^{}-\lbrace 1,2 \rbrace, etc.

Cette démonstration s'effectue en trois étapes :

L'étape initialisation : Montrer que le résultat est vrai pour le tout premier rang (en général le premier rang est 0, mais il se peut que le premier rang soit 1, 2 ou autre, cela dépend du résultat à démontrer).

L'étape hérédité : Montrer que le résultat est héréditaire, c'est-à-dire montrer que le résultat peut être "transmis" d'un rang fixé quelconque kk au rang suivant k+1k+1.

La conclusion.

Pour expliquer ce principe assez intuitivement, prenons les deux exemples suivants :

Exemple 1 : La file de dominos

picture-in-text
Si l'on pousse le premier domino de la file (Initialisation).
Et si les dominos sont posés l'un après l'autre d'une manière à ce que la chute d'un domino entraîne la chute de son suivant (Hérédité). Sauf s'il y a un trou...
Alors : Tous les dominos de la file tombent. (la conclusion)

Exemple 2 : L'échelle
Si on sait monter le premier barreau de l'échelle (Initialisation).
Et si l'on sait toujours passer d'un barreau au barreau qui le suit (Hérédité).
Alors : On peut monter l'échelle. (la conclusion)

II. Le principe de la démonstration par récurrence

Cette démonstration s’applique lorsque l’on cherche à démontrer qu’une propriété dépendant d’un entier naturel nn est vraie pour tout entier nn0n \geq n_0, n0n_0 étant un entier naturel donné.

On procède en trois étapes :

Étape n°1 : Initialisation

On montre que la propriété est vraie pour n=n0n = n_0 (au rang n0n_0).

Étape n°2 : Hérédité

On démontre que :
Si la propriété est supposée vraie pour un entier naturel nn supérieur ou égal à n0n_0 (ceci s’appelle l’hypothèse de récurrence), alors elle est vraie pour l’entier suivant n+1n + 1.
On veut donc montrer que, si elle est vraie à un rang nn, elle est aussi vraie au rang suivant n+1n + 1.

Étape n°3 : Conclusion

On combine les étapes 1 et 2 :
La propriété est vraie au rang n0n_0 (étape n°1) et elle est héréditaire à partir du rang n0n_0 (étape n°2), donc le principe de récurrence permet de conclure que la propriété est vraie pour n’importe quel entier naturel nn0n \geq n_0.

III. Exemples rédigés

1.1. Montrer une divisibilité par récurrence

Énoncé :

Montrer que pour tout entier naturel nn, 3 divise 4n14^n - 1.

On va utiliser une démonstration par récurrence.

On note P(n)P(n) la propriété : "3 divise 4n14^n-1".

Pour n=0n = 0 : 401=11=04^0 - 1 = 1 - 1 = 0 est divisible par 3, donc P(0)P(0) est vraie.

On suppose P(n)P(n) vraie, ce qui se traduit par : il existe un entier naturel kk tel que 4n1=3k4^n - 1 = 3k, donc 4n=3k+14^n = 3k + 1.

Au rang n+1n + 1 :
4n+11=4×4n1=4×(3k+1)1=4×3k+4×11=4×3k+3=3(4k+1)4^{n+1} - 1 = 4 \times 4^n - 1 = 4 \times (3k + 1) - 1 = 4 \times 3k + 4 \times 1 - 1 = 4 \times 3k + 3 = 3(4k + 1).

Conclusion : D'après le principe de récurrence, pour tout entier naturel nn, 3 divise 4n14^n - 1.

2.2. Déterminer le chiffre des unités : 4 méthodes pour un même énoncé

Énoncé
Un entier naturel nn étant donné, quel est le chiffre des unités de l'écriture décimale de n5nn^5-n ?

Un entier naturel nn étant donné, quel est le chiffre des unités de l'écriture décimale de n5nn^5 - n ?

On remarque, en effectuant plusieurs essais, que n5nn^5 - n se termine par zéro. On va essayer de le démontrer.

On peut écrire n5n=n(n1)(n+1)(n2+1)n^5 - n = n(n - 1)(n + 1)(n^2 + 1). Cette écriture appelle à deux remarques :

\circ le produit est pair car nn et n+1n + 1 sont deux entiers consécutifs.

\circ de plus, les naturels 2 et 5 sont premiers entre eux.

Donc, pour démontrer que n5nn^5 - n est divisible par 10, on doit démontrer uniquement qu'il est divisible par 5.

On va se servir de quatre méthodes différentes.

1ère Méthode : par récurrence

Pour n=0n = 0 : vraie

Supposons que la relation soit vraie au rang nn, soit : n5n=5kn^5 - n = 5k avec kNk \in \mathbb{N}.

Démontrons qu'elle est vraie au rang n+1n + 1, soit (n+1)5(n+1)(n + 1)^5 - (n + 1) est un multiple de 5.

On a :
(n+1)5(n+1)=n5+5n4+10n3+10n2+5n+1n1(n + 1)^5 - (n + 1) = n^5 + 5n^4 + 10n^3 + 10n^2 + 5n + 1 - n - 1
(n+1)5(n+1)=n5n+5(n4+2n3+2n2+n)=5k+5(n4+2n3+2n2+n)(n + 1)^5 - (n + 1) = n^5 - n + 5(n^4 + 2n^3 + 2n^2 + n) = 5k + 5(n^4 + 2n^3 + 2n^2 + n).

Cette dernière expression montre que la relation est vraie au rang n+1n+1.

Le principe de récurrence permet de conclure.

2ème méthode : les congruences

On étudie les valeurs possibles pour le reste dans la division euclidienne de nn par 5.

Si n0,(mod 5)n \equiv 0 , \text{(mod 5)}, alors n5n0,(mod 5)n^5 - n \equiv 0 , \text{(mod 5)}.
Si n1,(mod 5)n \equiv 1 , \text{(mod 5)}, alors n51,(mod 5)n^5 \equiv 1 , \text{(mod 5)} donc n5n0,(mod 5)n^5 - n \equiv 0 , \text{(mod 5)}.
Si n2,(mod 5)n \equiv 2 , \text{(mod 5)}, alors n52,(mod 5)n^5 \equiv 2 , \text{(mod 5)} donc n5n0,(mod 5)n^5 - n \equiv 0 , \text{(mod 5)}.
Si n3,(mod 5)n \equiv 3 , \text{(mod 5)}, alors n53,(mod 5)n^5 \equiv 3 , \text{(mod 5)} donc n5n0,(mod 5)n^5 - n \equiv 0 , \text{(mod 5)}.
Si n4,(mod 5)n \equiv 4 , \text{(mod 5)}, alors n54,(mod 5)n^5 \equiv 4 , \text{(mod 5)} donc n5n0,(mod 5)n^5 - n \equiv 0 , \text{(mod 5)}.

La conclusion est immédiate.

3ème méthode : factorisation de n5nn^5 - n

n5n=n(n1)(n+1)(n2+1)n^5 - n = n(n - 1)(n + 1)(n^2 + 1)

Si n0[5]n \equiv 0 \, [5] alors n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].

Si n1[5]n \equiv 1 \, [5] alors n10[5]n-1 \equiv 0 \, [5], alors n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].

Si n2n \equiv 2 ou n3[5]n \equiv 3 \, [5], alors n2+10[5]n^2 + 1 \equiv 0 \, [5] et n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].

Si n4[5]n \equiv 4 \, [5], alors n+10[5]n+1 \equiv 0 \, [5] et n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].

La conclusion en découle.

4ème méthode : on utilise le petit théorème de Fermat

n5n=n(n41)n^5 - n = n(n^4 - 1)

Si n0[5]n \equiv 0 \, [5] alors n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].

Si nn n'est pas congru à zéro (modulo 5), comme 5 est premier, nn est premier avec 5. D'après le petit théorème de Fermat, n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].

On a donc n5n0[5]n^5 - n \equiv 0 \, [5].