Le récit, du Moyen Âge au XVIIIe siècle

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Durant cette période, le récit connaît une grande évolution, de la chanson de geste au roman libertin, de la naissance du roman à l’anti-roman.

I. Du Moyen Âge au XVIe siècle : l’émergence du genre romanesque

1) Le Moyen Âge et la naissance du roman

Le terme « roman » naît au XIIe siècle pour désigner un récit écrit en langue romane, et non plus en latin : il s’agit de chansons de gestes, récits des aventures d’un chevalier.

L’auteur le plus connu est alors Chrétien de Troyes : il s’inspire de la légende du Graal et du cycle arthurien pour écrire cinq romans en vers, dont Perceval ou le Conte du Graal qui raconte la quête spirituelle du chevalier Perceval.

2) Le XVIe siècle : le récit au service de l’humanisme

L’esprit de la Renaissance et de l’humanisme s’exprime dans les trois grands romans de Rabelais, Pantagruel, Gargantua et Le Tiers Livre. Derrière le burlesque et les aventures extraordinaires de deux géants, le lecteur est amené à réfléchir sur la guerre, la religion, l’accès au savoir…

II. Au XVIIe siècle : préciosité, baroque et classicisme

Le roman pastoral (l’Astrée d’Honoré d’Urfé, 1607-1628) met en scène des bergers et des bergères dont les conversations reprennent celles des salons précieux.

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La préciosité se caractérise par un raffinement extrême du comportement, des idées et du langage.

Le roman héroïque et précieux montre des héros idéalisés impliqués dans des épopées et intrigues complexes. Artamène ou le Grand Cyrus (1649-1653) de Georges et Madeleine de Scudéry en est l’illustration.

Le roman baroque foisonne d’exubérance et de rebondissements. On peut citer L’Autre Monde ou les États et Empires de la Lune et du Soleil (1657) de Cyrano de Bergerac, qui narre un voyage fantaisiste et philosophique dans la Lune et le Soleil.

Le roman réaliste et satirique dresse le tableau des mœurs de l’époque. Il en va ainsi du Roman comique (1651-1657) de Paul Scarron.

Le roman d’analyse s’attache à décrire les variations de la passion. Il relève d’une esthétique classique, à l’image de La Princesse de Clèves de Madame de Lafayette (1678), récit bref qui oppose passion et raison à la cour du roi Henri II vers 1550. L’analyse psychologique du personnage en fait un roman moderne.

III. Au XVIIIe siècle : les écritures du « je » et l’esprit de provocation

1) Le récit à la première personne

Le roman picaresque, hérité d’un genre né en Espagne au XVIe siècle, raconte les aventures d’un picaro (personne en marge de la société). Lesage écrit Les Aventures de Gil Blas de Santillane (1715) dont le héros voyageur part à la recherche d’aventures plus ou moins honnêtes.

Le roman-mémoires donne la parole à des personnages de fiction qui racontent, à la première personne, les étapes de leur vie, et notamment leur ascension sociale (Marivaux, Le Paysan parvenu, 1735, et La Vie de Marianne, 1731-1741) ou leur déchéance (l’abbé Prévost, L’Histoire de Des Grieux et de Manon Lescaut, 1731).

Le roman épistolaire croise la correspondance de plusieurs épistoliers fictifs : deux voyageurs persans dans Les Lettres persanes de Montesquieu (1721), un couple de libertins et leurs « victimes » dans Les Liaisons dangereuses de Laclos (1782). L’absence de narrateur donne au récit une apparence d’objectivité.

2) L’anti-roman

Certains auteurs, tel Diderot dans Jacques le fataliste (1796), interrogent le genre romanesque pour le contester : on parle d’anti-roman. Le dialogue de Jacques et de son maître, sans cesse entrecoupé par des apostrophes au lecteur, rappelle l’illusion de la convention romanesque et empêche toute adhésion au récit.