Le jeu des puissances dans les relations internationales

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Vert : définitions

I. La guerre froide (1947-1991)

1) Vers la formation des blocs dans les années 1950-1960

En 1945, les Alliés préparent l’après-guerre et le retour de la démocratie en Europe par des élections libres. À la conférence de San Francisco (26 juin 1945), 51 États créent l’Organisation des Nations unies (ONU) pour maintenir la paix, protéger les droits de l’homme, aider au développement et défendre l’existence d’un droit international. Mais cet espoir de paix est menacé par la rivalité entre les deux grands vainqueurs, les États-Unis et l’URSS, qui peuvent paralyser l’action de l’ONU à leur encontre, par le droit de veto.

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Une frontière militaire s’établit entre une Europe de l’Ouest démocratique, pro-américaine, et une Europe de l’Est communiste : un « rideau de fer » hermétique qui coupe tout contact entre l’Ouest et l’Est. En 1947, la rupture est consommée : les États-Unis, par la doctrine Truman, et l’URSS, par la doctrine Jdanov, s’accusent mutuellement d’exercer une influence totalitaire sur leurs alliés, se proclament tous deux « seul défenseur des libertés » et appellent à former des « blocs » d’États alliés pour freiner la progression de l’autre. Chaque camp utilise la propagande contre l’idéologie adverse. Les Américains soupçonnés de communisme sont chassés de leur emploi, parfois emprisonnés (maccarthysme), tandis que les opposants restent persécutés en URSS.

2) Les crises de la guerre froide (1948-1962)

a) Premiers conflits, premiers compromis (1948-1953)

Depuis 1945, l’Allemagne et Berlin sont occupées par les Américains, les Français et les Anglais à l’ouest, par les Russes à l’est. Or Berlin se trouve au cœur de la zone communiste. Les Soviétiques coupent les communications et le ravitaillement de Berlin-Ouest : ils organisent le blocus de Berlin (1948-1949) et poussent ainsi les Occidentaux à quitter volontairement la ville. Mais ces derniers ripostent en installant un pont aérien coûteux qui ravitaille Berlin-Ouest pendant dix mois. Les négociations aboutissent en 1949 à la séparation de l’Allemagne entre la république fédérale allemande (RFA) à l’Ouest, pro-américaine, et la république démocratique allemande (RDA) à l’Est, pro-soviétique.

 

Le conflit se poursuit en Corée (1950-1953) : le Nord communiste, soutenu par l’URSS et la Chine, envahit la Corée du Sud qui demande de l’aide aux États-Unis et à l’ONU. Les deux blocs arment et ravitaillent les deux camps jusqu’à un abandon mutuel des positions en 1953, causant 3 millions de morts et laissant face à face deux Corées hostiles.

b) La coexistence pacifique (1954-1961)

La mort de Staline (1953) inaugure une phase de détente, la coexistence pacifique (1954-1961) : les nouveaux dirigeants, inquiets du risque nucléaire, tolèrent leur adversaire s’il ne se mêle plus de leur politique. Il s’agit de limiter les conflits meurtriers et de réduire les dépenses militaires, tout en poursuivant le conflit par la propagande…

c) La reprise des tensions : Berlin (1961) et Cuba (1962)

Plusieurs millions d’Européens de l’Est fuient la RDA pour la RFA, en passant par Berlin-ouest. La RDA décide de mettre fin à ce départ massif, en fermant la frontière en une nuit, par la construction d’un mur entre Berlin-Est et Berlin-Ouest (12-13 août 1961). Le président américain J. F. Kennedy prononce un discours à Berlin en 1963, dénonçant le mur comme un symbole de la liberté mise à mal par le totalitarisme soviétique, une preuve de l’échec du communisme. Il proclame le bloc de l’Ouest défenseur des libertés.

 

En 1959, Fidel Castro réussit une révolution communiste à Cuba, à quelques centaines de kilomètres des côtes américaines. L’île devient un poste d’observation et une menace du bloc de l’Est sur les États-Unis. Cette crainte est confirmée en octobre 1962, lorsque les Américains découvrent que l’URSS aide Cuba à installer des rampes de lancement de missiles nucléaires capables d’anéantir le Sud-Est des États-Unis. La flotte américaine installe alors un blocus autour de Cuba et barre la route à la flotte soviétique chargée de matériel nucléaire. Pour la première fois, les Américains et les Russes sont en conflit direct, l’angoisse de la guerre nucléaire touche le monde entier. Après un long bras de fer, les deux Grands acceptent un compromis : les Russes retirent tout équipement nucléaire à Cuba, les Américains tolèrent le régime de Castro. L’ONU demande une sortie diplomatique du conflit.

 

À savoir

La guerre froide : les deux blocs s’opposent sur des théâtres d’opération lointains par États alliés interposés, sans conflit direct entre les États-Unis et l’URSS, par peur d’une guerre nucléaire. Les conflits sont très coûteux, très meurtriers, surtout entre 1948 et 1962. L’ONU s’interpose peu à cause du droit de veto des deux Grands. Une course aux armements mobilise des armes de destruction massive de part et d’autre, pour dissuader l’adversaire d’attaquer, c’est ce qu’on appelle l’équilibre de la terreur. Les crises illustrent la détermination des Grands et leur crainte d’une guerre nucléaire dont personne ne sortirait vainqueur.

3) De la Détente à la fin du conflit (1962-1991)

a) Entre Détente, tensions et affaiblissement des blocs (1962-1985)

Les dangers impliqués par la crise de Cuba ouvrent une période de Détente durant laquelle les États-Unis et l’URSS essaient d’aboutir à des accords de désarmement et de limitation des armes nucléaires (ex. : accords d’Helsinki en 1975). La guerre se focalise sur la propagande et la rivalité technologique (ex. : les Russes envoient le premier satellite artificiel (Spoutnik, 1957), le premier homme dans l’espace (Y. Gagarine, 1961), mais les Américains effectuent le premier pas sur la lune en 1969). L’art et la culture sont mobilisés : cinéma (James Bond), bandes dessinées (Captain America), radios…

Les deux Grands poursuivent cependant en parallèle une « course aux territoires », cherchant des alliés en Asie, Afrique et Amérique du Sud. La longue guerre du Vietnam (1963-1975) illustre le retour ponctuel de tensions : les deux Grands s’enlisent et subissent des pertes humaines énormes (Nord communiste soutenu par l’URSS et la Chine contre le Sud soutenu par les États-Unis). L’opinion internationale est de plus en plus critique.

Les blocs s’affaiblissent tandis qu’apparaissent des organisations régionales, en signe de volonté de ne plus suivre aveuglément la politique des superpuissances. À l’ouest, la France, la RFA, l’Italie, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas se rapprochent économiquement en 1951 (Communauté économique du charbon et de l’acier) puis étendent leur partenariat à tous les aspects de l’économie, y compris l’énergie : la Communauté économique européenne (CEE) est fondée par le traité de Rome en 1957. Cependant, la CEE n’arrive pas à créer une armée commune (échec de la Communauté européenne de défense en 1954), ni une diplomatie commune indépendante (échec du plan Fouchet, initié par la France en 1961-1962). Le projet européen s’élargit en 1973 (Royaume-Uni, Irlande, Danemark), 1981 (Grèce) et 1986 (Espagne, Portugal).

À l’échelle nationale, les blocs s’effritent : la France se réconcilie avec l’Allemagne (traité de l’Élysée, 1963) et quitte l’OTAN en 1966 par volonté d’indépendance et contestation de la guerre du Vietnam. De jeunes pacifistes américains manifestent pour la paix (Woodstock, 1968). À l’Est, la Chine refuse la Détente, des mouvements libéraux sont sévèrement réprimés (ex. : Hongrie, 1956 ; « printemps de Prague » en Tchécoslovaquie, 1968).

L’URSS relance une politique agressive dès 1979 en envahissant l’Afghanistan dans le but de s’emparer du pétrole du Moyen-Orient, provoquant une intervention américaine. Une vague anti-occidentale et anticommuniste se développe au Moyen-Orient et installe des régimes extrémistes (Iran et Irak en 1979). L’URSS et les États-Unis installent des missiles nucléaires en Europe, le long du rideau de fer (crise des euromissiles, 1980-1987).

b) La fin de la guerre froide : vers un monde unipolaire ? (1985-1991)

La reprise de la course aux armements, de même que les soutiens financiers coûteux aux alliés, affaiblissent économiquement les Grands. Mikhaïl Gorbatchev, élu à la tête de l’URSS en 1985, prépare la fin d’un conflit que l’URSS ne peut plus financer, en engageant des réformes « libérales » (la perestroïka rétablit un secteur privé et les libertés de pensée). L’URSS s’ouvre à la démocratie. Le désarmement est négocié en 1987 (traité de Washington), mettant un terme aux euromissiles.

En 1989, l’URSS ne peut plus garder le contrôle du bloc de l’Est où les mouvements de contestation se multiplient : les peuples se soulèvent, réclamant des démocraties libérales. Le mur de Berlin s’effondre (9 novembre 1989). L’URSS rend sa liberté à l’Europe de l’Est : réunification allemande en 1990, indépendance des pays baltes en 1991, séparation des Tchèques et des Slovaques en 1993… Les réformes sont cependant trop rapides, les conditions de vie se dégradent, réveillant le nationalisme dans chaque république soviétique. Le 25 décembre 1991, Gorbatchev annonce la fin de l’URSS, alors que chaque république se déclare indépendante. Gorbatchev proclame alors l’échec du communisme stalinien et laisse la place à une Fédération de Russie en transition vers la démocratie et le capitalisme. La guerre froide s’achève sur la victoire américaine.

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Le monde pendant la guerre froide

À savoir

Un monde est multipolaire lorsqu’il dépend de plusieurs pôles politiques, économiques et culturels appelés puissances, qui sont des États ou des groupes d’États. Il est bipolaire lorsque deux « superpuissances » dominent les événements mondiaux (États-Unis et URSS en 1947-1991) et unipolaire si une puissance unique est dominante (« hyperpuissance »).

II. Un monde multipolaire ? (1947-1991)

1) L’émergence de nouveaux États par la décolonisation

En parallèle à la guerre froide, des revendications s’affirment dans les empires coloniaux. La décolonisation n’est pas décidée par les États européens : les peuples colonisés refusent la domination européenne et veulent former des États-nations indépendants. Ces revendications, parfois formulées dès le XIXe siècle sont soutenues par les milieux cultivés de ces colonies (ex. : Gandhi en Inde), qui ont appris les notions de liberté, d’égalité, de droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, réaffirmées par la déclaration universelle des droits de l’homme (1948). Les demandes s’accélèrent dès 1945 en raison de l’affaiblissement des États européens et de la mobilisation massive des colonies en 1914-1945. Les mouvements anticolonialistes et indépendantistes reçoivent l’appui d’intellectuels européens, des États-Unis (anciennes colonies britanniques, devenues indépendantes en 1783), de l’URSS (opposé à l’impérialisme) et de l’ONU.

De nouveaux États indépendants émergent d’abord en Asie puis en Afrique, surtout entre 1947 et 1962. L’indépendance s’obtient par des guerres sanglantes (Indochine 1945-1954, Algérie 1954-1962) ou des négociations qui permettent de garder des liens de coopération avec l’ancienne métropole (ex. : Afrique noire française dès 1960…).

2) Le « non-alignement » du Tiers-Monde

La conférence de Bandung en Indonésie (1955) affirme l’existence d’un Tiers Monde, réunissant 29 jeunes États indépendants qui refusent la guerre froide. Le Tiers Monde réclame des mesures en faveur du développement et condamne la colonisation. Les jeunes États souhaitent rester en paix, libres, être considérés sur un pied d’égalité à l’échelle internationale et se concentrer sur leur développement. La conférence de Belgrade (1961) affirme leur non-alignement, leur refus de s’intégrer à un bloc.

Cependant, le mouvement se réduit après 1962. Certains jeunes États, désireux d’accélérer leur développement, se laissent tenter par les aides économiques des Grands. Des tensions éclatent entre pays du Tiers Monde (ex. : entre le Pakistan et l’Inde), la diplomatie commune est difficile à maintenir… De nombreux États peinent à gérer une croissance démographique, des guerres, des famines, des épidémies… qui freinent leurs efforts de développement. La « troisième voie » ne survit pas aux années 1970.

3) L’émergence de nouveaux enjeux mondiaux

De nouvelles organisations régionales se structurent en marge de la guerre froide et de la décolonisation. En 1957, le traité de Rome fonde la CEE qui participe à la construction d’une puissance économique qui évolue vers une union politique avec le traité de Maastricht (1992). Certains États du Tiers Monde se rapprochent : l’OPEP (organisation des pays exportateurs de pétrole, 1960), l’organisation de l’unité africaine

Certains conflits échappent au contrôle des deux Grands (ex. : Israël-Palestine depuis 1947). La Chine, devenue une puissance nucléaire, joue un rôle international croissant en devenant membre permanent au Conseil de sécurité de l’ONU (1971). Le monde bipolaire est en fait multipolaire pendant cette période ; les relations Est-Ouest ne sont pas tout.

III. Le monde multipolaire depuis 1991

1) Un monde toujours instable

Le monde reste instable en raison de la permanence de conflits qui touchent aussi les populations civiles : guerres ethniques (au Rwanda en 1994, les Hutus cherchent à éliminer les Tutsis), conflits territoriaux (Inde-Pakistan, Israël Palestine…), rivalités économiques autour de l’accès à l’eau, à l’énergie (ex. : guerre du Golfe en 1990-1991 : l’Irak envahit le Koweït pour prendre le pétrole). Des mouvements libéraux contestent les régimes qui ne respectent pas les droits de l’homme (ex. : « printemps arabe » en 2011 : les populations d’Afrique du Nord chassent leurs dictateurs et aspirent à plus de libertés).

Les espaces de conflits majeurs restent le Proche-Orient (Israël-Palestine), le Moyen-Orient, la Corne de l’Afrique et l’Afrique de l’Ouest, ainsi que la mer de Chine (Corée du Nord, Chine, Japon). Les civils sont les premières victimes de ces conflits, ils fuient les régions en guerre (Syrie) : les réfugiés politiques sont de plus en plus nombreux.

Pratiquant une violence aveugle contre les populations civiles, le terrorisme connaît une recrudescence depuis les années 2000 (attentat du 11 septembre 2001 contre les États-Unis par l’organisation islamiste Al Qaïda, attentats de Paris de 2015-2016…). La criminalité internationale (piraterie au large de la Somalie, enlèvements) et les trafics divers (drogue, médicaments, armes…) ajoutent à l’insécurité mondiale. La question de l’arme nucléaire reste posée : certains États menacent de se doter de l’arme nucléaire (Iran) ou de s’en servir (Pakistan, Corée du Nord).

 

2) Les États-Unis, « superpuissance » mondiale ?

À la fin de la guerre froide, les États-Unis sont la seule superpuissance mondiale. En 1991, avec l’accord de l’ONU, les États-Unis dirigent une coalition internationale et repoussent les Irakiens du Koweït (guerre du Golfe). Mais l’organisation islamiste intégriste Al Qaïda veut montrer au monde entier que les États-Unis sont vulnérables. Après le 11 septembre 2001, les États-Unis engagent des guerres préventives contre le terrorisme.

Or, ces conflits suscitent un sentiment d’antiaméricanisme : renversement du régime dictatorial des Talibans en Afghanistan en 2001, invasion de l’Irak et renversement de Saddam Hussein en 2003 contre l’avis de l’ONU… Les États-Unis quittent de plus l’Irak en 2011 et l’Afghanistan en 2014, sans être parvenus à les pacifier. Le rôle de « gendarme du monde », assumé par les États-Unis, est de plus en plus contesté par les autres puissances.

Définition

Superpuissance : nation dont le rayonnement économique, politique, culturel et militaire domine à l’échelle mondiale. La puissance régionale a une influence moins étendue.

3) L’émergence de nouvelles puissances

Les puissances émergentes s’affirment dans la mondialisation et dans la géopolitique mondiale, particulièrement les BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) : ce sont de nouvelles puissances démographiques (40 % de la population mondiale), économiques et militaires. Elles intègrent de grandes organisations internationales (ex. : OMC, ONU…).

De nouvelles organisations commerciales régionales apparaissent (ex. : l’Union européenne, l’ASEAN, le Mercosur en 1994…). L’Union européenne, fondée par le traité de Maastricht (1992), crée la citoyenneté européenne, renforce les échanges dans son espace intérieur et la sécurité de ses frontières extérieures (traité de Schengen, 1995) et initie une monnaie commune, l’euro (1999).

De nouveaux acteurs (firmes transnationales, ONG…) font naître des enjeux internationaux : mondialisation, développement durable…

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Les conflits dans le monde depuis le début des années 1990