La valeur des modes et des temps

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Les modes verbaux traduisent la façon dont le locuteur envisage l’action exprimée par le verbe. Les temps verbaux situent l’action dans une chronologie des événements. Les identifier dans un texte permet de déterminer la façon dont le locuteur se situe par rapport à l’action.

I Les modes verbaux

1 Trois modes personnels

L’indicatif est le mode de la réalité ; il inscrit l’action dans une temporalité donnée comme réelle, passée, présente ou future.

Le subjonctif est le mode du possible. Dans les propositions indépendantes ou principales, il exprime l’ordre, le souhait, l’indignation… Dans les propositions subordonnées, son usage est imposé par le sens du verbe de la principale.

L’impératif est le mode de l’injonction ; il permet d’exprimer l’ordre, le souhait, la recommandation.

2 Deux modes impersonnels

L’infinitif exprime le sens du verbe sans l’inscrire dans un processus temporel ; il constitue la forme nominale du verbe. On peut l’utiliser pour raconter un événement en se limitant sèchement aux faits : on parle alors d’un infinitif de narration (Et Paul de courir à sa rencontre).

Le participe a différentes formes. Le participe passé donne l’action comme achevée. Le participe présent donne l’action comme se déroulant. Le gérondif (en + participe présent) précise les circonstances de l’action principale.

II Les temps de l’indicatif

1 Les temps simples

Le présent peut avoir différentes valeurs.

présent d’énonciation

Il exprime une action qui se déroule au moment où l’on parle. Je suis sûr que c’est lui.

présent de narration

Il raconte des faits passés au présent, pour les rendre plus vivants. En 1789, le peuple prend la Bastille.

présent de vérité générale

Il permet d’exprimer une idée universelle, valable partout et tout le temps. Les hommes sont mortels.

L’imparfait exprime en général une action passée inachevée, mais peut aussi traduire une action répétée. Dans le récit, il est le plus souvent réservé à la description et aux actions de l’arrière-plan.

Le passé simple présente une action passée et achevée ; par opposition à l’imparfait, il est le temps de la narration, et exprime des actions de premier plan.

Nous étions à l’étude, quand le proviseur entra, suivi d’un nouveau habillé en bourgeois et d’un garçon de classe qui portait un grand pupitre. Ceux qui dormaient se réveillèrent, et chacun se leva comme surpris dans son travail.

Gustave Flaubert, Madame Bovary (1857)

imparfait= arrière-plan passé simple= premier plan

Le futur exprime une action encore à venir. Il peut aussi exprimer une vérité générale (Paris sera toujours Paris).

Le conditionnel permet d’exprimer le futur par rapport à une action passée (Il a dit qu’il viendrait le lendemain). Il exprime l’hypothèse dans les systèmes hypothétiques (Je prendrais des vacances, si je le pouvais). Employé comme modalisateur, il souligne le caractère incertain de l’énoncé (Selon nos informations, le ministre s’apprêterait à démissionner).

2 Les temps composés

Le passé composé exprime une action passée et achevée qui a des répercussions dans le présent ; à l’oral, il est utilisé comme substitut familier du passé simple.

Le plus-que-parfait, le passé antérieur et le futur antérieur expriment une action achevée antérieure à une autre action, exprimée à un temps simple.

Zoom

Analyser les temps verbaux dans un récit autobiographique

Il y a quatre ans qu’à mon retour de la Terre Sainte, j’achetai près du hameau d’Aulnay, dans le voisinage de Sceaux et de Châtenay, une maison de jardinier, cachée parmi les collines couvertes de bois. Le terrain inégal et sablonneux dépendant de cette maison n’était qu’un verger sauvage […]. Les arbres que j’y ai plantés prospèrent, ils sont encore si petits que je leur donne de l’ombre quand je me place entre eux et le soleil. Un jour, en me rendant cette ombre, ils protégeront mes vieux ans comme j’ai protégé leur jeunesse. Je les ai choisis autant que je l’ai pu des divers climats où j’ai erré, ils rappellent mes voyages et nourrissent au fond de mon cœur d’autres illusions.

Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe (1849-1850), incipit.

Chateaubriand utilise un système de temps complexe : au présent de l’écriture s’ajoutent le passé simple et l’imparfait qui renvoient au moment de l’achat de la maison, le passé composé évoquant un passé plus proche, et même le futur, grâce auquel Chateaubriand se projette dans ses vieux jours.