Tout comme la compréhension de sa forme, la détermination scientifique de l’âge de la Terre n’a été possible qu’après un long cheminement d’idées.
I Des croyances aux premiers arguments géologiques
Pour les philosophes grecs tel Aristote et jusqu’à la fin du Moyen Âge, la Terre est éternelle : il n’y a aucun début et donc aucun âge à calculer !
Puis, du XVIe au XVIIIe siècle, des savants se risquent à donner un âge à la Terre. À l’époque, le récit biblique, incontestable, est la seule référence possible. Le calcul le plus célèbre est dû à James Ussher qui affirme, en 1650, et en se basant sur les textes de l’Ancien testament, que la Terre s’est formée au début de la nuit précédant le 23 octobre de l’an 4004 avant J.-C. !
Repère
À noterPar exemple, si on estime qu’il faut 100 ans pour déposer une couche d’argile de 1 millimètre d’épaisseur, une couche d’un mètre d’épaisseur nécessitera 100 000 ans.
À partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, les premiers géologues estiment à plusieurs millions d’années le temps de formation des couches sédimentaires ou d’ablation des reliefs, en supposant ces phénomènes constants dans le temps.
Cependant, si l’idée que la Terre a une très longue histoire commence à émerger, peu d’auteurs osent encore l’affirmer, craignant une condamnation de la part de l’Église.
II L’approche expérimentale de l’âge de la Terre au XVIIIe siècle
Georges Louis Leclerc, comte de Buffon, peut être considéré comme le père de la datation scientifique. En effet, il est le premier à aborder la détermination de l’âge de la Terre de manière expérimentale en 1778.
Selon l’hypothèse de Buffon, la Terre était en fusion au début de son histoire. Le globe actuel serait donc le résultat de son refroidissement.
Afin de tester cette hypothèse, il chauffe au rouge des sphères de rayons différents et composées de matériaux variés, puis mesure les durées de refroidissement nécessaires pour atteindre la température ambiante.
En extrapolant ses résultats à une sphère aux dimensions terrestres, il trouve qu’il faudrait environ 75 000 ans pour que le globe arrive à sa température actuelle. Ses carnets d’expérience donnent cependant un âge de plus de 10 millions d’années à la Terre, chiffre qu’il n’a jamais publié, car difficile à croire à l’époque.
III Au XIXe siècle, les querelles entre scientifiques
Le XIXe siècle est marqué par une controverse scientifique sur l’âge de la Terre : les calculs effectués par les physiciens ne donnent pas les mêmes âges que ceux estimés par les géologues ou les biologistes.
Charles Darwin estime, en 1859, en calculant le temps mis par l’érosion pour creuser une vallée dans le sud de l’Angleterre, que 300 millions d’années (Ma) se sont écoulées depuis la fin de l’ère secondaire. Cette durée lui semble compatible avec les lents processus de l’évolution biologique.
Lord Kelvin reprend, en 1862, l’hypothèse de Buffon. Il calcule la durée de la solidification de la Terre en utilisant les lois physiques et propose un âge compris entre 20 et 400 Ma, réduit ensuite à 24 Ma en accord avec d’autres physiciens.
En 1900, John Joly parvient à 90 Ma pour la formation des océans en calculant le temps mis pour atteindre leur salinité actuelle.
IV Le XXe siècle et la datation radiochronologique
La découverte de la radioactivité par Henri Becquerel en 1896 permet à Ernest Rutherford de dater, en 1905, deux minéraux riches en uranium, l’un à 140 Ma, un autre à 500 Ma. Lord Rayleigh, par la même méthode, est le premier, en 1905, à proposer un âge dépassant le milliard d’années pour la Terre.
En 1953, Clair Patterson date une météorite à 4,55 milliards d’années, un âge proche de celui de la Terre aujourd’hui estimé à 4,57 milliards d’années.
ZoomHistoire des estimations de l’âge de la Terre