Les appareils respiratoires isolants (ARI) ont pour but de créer et de maintenir une atmosphère respirable isolée de l’air extérieur pollué ou infecté et d’assurer une protection oculaire. Les atmosphères non respirables comprennent : les fumées d’incendie (inflammables, toxiques, rayonnantes, opaques, envahissantes) et les épandages ou atmosphères toxiques.
1 - Les contraintes physiologiques
Les perturbations sensorielles dues aux ARI sont de trois types :
- modifications du schéma corporel : modification des capacités de mobilisation du tronc ou du cou, augmentation du gabarit du porteur, modification du centre de gravité ;
- déficits sensoriels : la vue, l’audition, l’odorat ;
- vie en relation : le casque perturbe l’audition ; le masque ne rend la voix audible qu’à faible distance, la communication est difficile.
Les conséquences opérationnelles pour le porteur sont l’obligation d’arrêter son activité et d’être très attentif lors des phases de communication.
2 - L'augmentation du travail et des efforts du porteur d'ARI
A - Les résistances respiratoires et expiratoires
Avec un ARI, on doit « lutter » contre une résistance inspiratoire (lors de l’inspiration, le porteur doit créer une dépression à l’intérieur du masque pour actionner la soupape à la demande) et expiratoire (effort nécessaire pour vaincre la résistance de la soupape d’expiration).
B - Le stress émotif
Il augmente la fréquence cardiaque du porteur et génère une perte de lucidité, augmentant ainsi les efforts du porteur et sa consommation d’air.
C - L'augmentation du poids du porteur
Le poids d’un appareil respiratoire isolant à circuit ouvert peut varier entre 10 et 16 kg sans excéder les 18 kg (norme NF EN137). Cela influe sur la marche (moins aisée) et les mouvements du corps (plus éprouvants), les déplacements verticaux (plus difficiles), générant une augmentation de la dépense d’énergie pour un travail donné.
D - La thermorégulation
Lors d’un effort physique, le travail musculaire participe à l’élévation de la température, la diminution de la chaleur corporelle étant alors assurée par la sudation. Sous ARI, trois facteurs interviennent sur l’équilibre thermique : l’exposition aux très fortes températures, la perte d’efficacité de la sudation (à cause des EPI) et l’effort physique.
La seule possibilité physiologique permettant la perte de chaleur est la ventilation. Cela reste insuffisant, même en accélérant la fréquence ventilatoire.
E - L'espace mort
C’est le volume d’air restant non expiré présent depuis les alvéoles pulmonaires jusqu’à la soupape d’expiration. Il comprend : les bronchioles, les bronches et les voies aériennes supérieures ainsi que le volume restant libre à l’intérieur du demi- masque.
L’espace mort génère deux effets négatifs pour le porteur d’ARI : il augmente le volume d’air nécessaire à la bonne ventilation du porteur et une partie de l’air riche en CO2 est inspirée à nouveau. Le CO2 provoque une hyperventilation et une sécrétion d’hormones, et augmente la consommation d’air.
3 - Le matériel
Deux types d’appareils peuvent être utilisés :
- les appareils respiratoires isolants à circuit ouvert (ARICO), dans lesquels l’air expiratoire est rejeté à l’extérieur du circuit ;
- les appareils respiratoires isolants à circuit fermé (ARICF), pour lesquels l’air expiratoire est réinjecté dans le circuit, après avoir été appauvri en CO2, enrichi en O2, desséché et réfrigéré avant d’être réutilisé.
A - Les ARICO
1) Les éléments principaux
Les ARICO sont composés de huit éléments principaux :
– le harnais (NF EN 137) est le châssis de l’appareil respiratoire. Il a une double fonction : répartir le poids de l’ARI et supporter l’ensemble des éléments de sécurité ;
– la pièce faciale (NF EN 136-10 – classe 3) : le masque est un élément essentiel de l’ARI car la sécurité de l’intervention en dépend ;
– la bouteille constitue la réserve d’air. Elle peut être munie d’un dispositif permettant de différencier les vides des pleines ;
– le détendeur HP/MP (NF EN 137) a pour but d’abaisser la pression de la bouteille à +/− 7 bars tout en conservant un débit continu et régulier. Il reçoit le manomètre et le sifflet de fin de charge. Il alimente la SAD ;
– la soupape à la demande (SAD) (NF EN 137) a pour fonctions d’abaisser la pression (à une valeur légèrement supérieure à celle de la pression atmosphérique), de délivrer de l’air à la demande et de délivrer de l’air supplémentaire en continu via le bouton d’apport d’air additionnel (by-pass) ;
– la plaque de contrôle facilite le contrôle des porteurs d’ARI ;
– le système sonore de détresse : il en existe de nombreuses sortes (corne d’appel, balise sonore...). Le principe est d’augmenter la sécurité via un système de détection d’immobilité qui déclenche une alarme audible. Cette alarme peut être activée manuellement. Ce dispositif est souvent couplé à un détecteur de chaleur, voire au manomètre ;
– la liaison personnelle, en dotation individuelle, permet de se déplacer le long de la ligne guide, et au binôme de rester en liaison. La liaison personnelle mesure 6 m de longueur totale et 4 mm de diamètre. L’extrémité est équipée d’un mousqueton. Elle se compose de deux parties : une courte de 1,25 m et une longue de 4,75 m déblocable.
2- Les autres éléments
En sus de l’ARI peut être utilisée, lors de grandes reconnaissances, la ligne guide. Elle permet d’avoir une liaison avec le contrôleur et de revenir au point d’entrée. C’est une cordelette de 50 m de long et de 6 à 8 mm de diamètre, dotée à chaque extrémité d’un mousqueton, équipée de repères tactiles indiquant le sens de la progression.
Ligne de vie = liaison personnelle + ligne guide
Les dispositifs de dérivation sont destinés à établir de nouvelles lignes guides (lignes secondaires) à partir d’une ligne guide principale ; au nombre de trois, ils sont accrochés sur le sac de transport.
Le tableau de contrôle permet au contrôleur de regrouper les plaques de contrôle des binômes, de surveiller les personnels engagés, de suivre et de contrôler le temps d’engagement des porteurs.
La plaque de contrôle est l’unique moyen d’enregistrement et de contrôle des porteurs qui s’engagent. Dessus, sont notés le nom, la pression d’engagement et l’heure d’entrée. Elle se fixe au tableau de contrôle.
B - Les ARI (NF en 145)
Ce matériel est utilisé le plus souvent par des équipes spécialisées pour de longues reconnaissances. Il se compose des éléments suivants :
- le masque (ou pièce faciale) est un masque respiratoire avec panorama à doubles lèvres d’étanchéité, membrane phonique, avec essuie-glace et oculaire ;
– le détendeur assure plusieurs fonctions : il abaisse la pression de la bouteille à 4 bars environ à un débit de 1,5 L/min et reçoit le manomètre ;
– le sac respiratoire possède une capacité de 5 L et comprend les raccordements d’arrivée d’oxygène et d’air ;
– la cartouche régénératrice contient environ 2,2 L de chaux sodée pour absorber le CO2 ;
– la bouteille d’oxygène a une capacité de 1 L à une pression de 200 bars ;
– la boîte à valves contient les valves de commande, la pulmo-commande, la valve de surpression et le signal d’alarme.
4 - Le mode opératoire et les règles de base
A - Avant l'engagement
Le contrôleur est l’élément essentiel du dispositif de reconnaissance ; son rôle est primordial. Ses missions sont les suivantes :
– l’enregistrement et la supervision des actions initiales des personnels :
- il s’assure du port correct des EPI,
- il établit un code de communication,
- il récupère les plaques de contrôle et enregistre les binômes avant l’engagement,
- il renseigne les fonctions et les secteurs d’exploration des binômes,
- il s’assure du respect de la pression minimale d’engagement,
- il renseigne l’heure de sortie prévisible des binômes ;
- il calcule l’heure de sortie prévisible : sur le tableau de contrôle, le contrôleur doit renseigner l’heure prévisible de sortie pour chaque binôme, se basant sur la plus faible autonomie (théorique).
T(durée maxi) = P(pression initiale) × V(volume bouteille)/ C(consommation connue du porteur)
Les porteurs opèrent des vérifications individuelles : avant de s’engager, chaque porteur doit individuellement s’assurer de respecter le moyen mnémotechnique RAPACE :
- R : ouverture du Robinet ;
- A : Ajustement du harnais ;
- P : Pression au manomètre ;
- A : Armement du système sonore de détresse ;
- C : Code de communication ;
- E : Étanchéité du masque.
B - Pendant l'engagement
À savoir : règle essentielle : pendant l’engagement, toujours travailler en binôme !
Pendant que les équipes sont engagées, le contrôleur est seul responsable de la sécurité des porteurs. Il doit :
- ne contrôler qu’un seul point d’accès ;
- superviser cinq binômes au maximum, dont le binôme de sécurité ;
- faire assurer l’approvisionnement en bouteilles d’air de rechange ;
- garder un binôme de sécurité prêt à intervenir immédiatement ;
- rester en relation avec son chef d’agrès et le tenir informé du déroulement de la reconnaissance ;
- prendre les mesures d’urgence en cas de besoin.
Les binômes assurent les missions suivantes :
- utilisation de la ligne de vie : en règle générale, le binôme d’exploration doit avoir une ligne de vie dès que la longueur d’exploration dans les étages est susceptible de dépasser 20 m ou dès que le binôme doit s’engager en sous-sol ;
- utilisation de la liaison personnelle : le mousqueton de la liaison personnelle du chef est accroché sur l’anneau d’amarrage de la liaison de l’équipier. L’équipier, quant à lui, se raccorde directement sur la ligne guide par le biais de son mousqueton. En configuration normale, seul le chef débloque sa portion longue, celle de l’équipier ne l’étant que sur ordre, ou si le chef se trouve en difficulté ou encore si une victime est visible du chef et nécessite un plus grand éloignement de la ligne guide ;
– utilisation de la ligne guide : durant la reconnaissance, le binôme d’exploration établit la ligne guide afin de s’assurer un retour sûr et rapide vers la sortie.
Si l’équipe doit se retirer avant la fin de la reconnaissance, le binôme doit amarrer la ligne guide avant de faire demi-tour :
– reconnaissance simple : l’équipier est relié à la ligne guide par sa portion courte. Le chef est relié à son équipier par sa portion courte ;
– travaux ou prise en charge d’une victime : chaque membre du binôme est relié à la ligne guide au moyen de sa portion courte ;
– reconnaissance latérale : le chef est relié à l’équipier au moyen de ses 6 m de liaison personnelle, par sa portion courte ;
– opération complexe : les équipes qui sortent sont prioritaires sur celles qui entrent. Des ramifications sont installées au moyen des dispositifs de dérivation ;
– exploration d’une pièce : il n’y a pas de méthodologie particulière. Il faut être ordonné pour reconnaître l’ensemble du volume.
C - Après l'engagement
- Vérification, pointage et regroupement du matériel.
- Remise en service de l’ARI.
- Contrôle visuel du masque.
- Signalement de toute anomalie.
À savoir : Les notions de cette fiche et des schémas font l’objet d’un guide national de référence (GNR) téléchargeable sur le site du ministère de l’Intérieur.
Documentation technique : https://www.foucherconnect.fr/rcspv03