Parcours : Modernité poétique ?
Au début du XXe siècle, la poésie, comme la peinture, connaissent de profonds bouleversements. Guillaume Apollinaire s’enthousiasme pour les peintres cubistes et cherche dans sa poésie à effectuer la même révolution.
I. Connaître l’œuvre
1) L’auteur et le contexte
Guillaume Apollinaire se trouve au cœur de la vie intellectuelle et artistique du début du XXe siècle. Il est surtout connu pour son recueil, Alcools (1913), pour ses Calligrammes (1918) et pour ses Poèmes à Lou écrits depuis le front pendant la Première Guerre mondiale.
Proche des peintres cubistes, il a également publié Méditations esthétiques (1913), manifeste pour la peinture cubiste.
Il crée le néologisme « surréalisme » pour signifier que créer n’est pas imiter la nature. Il est, un moment, proche du « futurisme », mouvement pictural italien qui prône la vitesse. Enfin, dans L’Esprit nouveau et les Poètes (1917), il explicite sa conception d’une poésie nouvelle, dont le ressort est la surprise.
J’ai pensé qu’il fallait revenir à la nature même, mais sans l’imiter à la manière des photographes. Quand l’homme a voulu imiter la marche, il a créé la roue qui ne ressemble pas à une jambe. Il a fait ainsi du surréalisme sans le savoir.
Apollinaire, Mamelles de Tirésias, préface.
2) Composition et thèmes du recueil
Alcools rassemble une cinquantaine de poèmes, écrits entre 1898 et 1913. L’ordre n’est ni chronologique, ni thématique. Le poète privilégie un système d’échos (ainsi du premier et du dernier poème qui se répondent l’un l’autre) et d’alternance entre pièces longues et pièces courtes (ainsi du monostiche « Chantre », qui suit « Palais », composé de onze quatrains).
Le poème d’ouverture, « Zone », écrit en 1913, a fonction de manifeste par le choix du vers libre, la forme longue, narrative, la coexistence du présent (la « rue industrielle ») et du passé (lieux traversés, expériences vécues…).
Apollinaire affirme que chaque poème renvoie à des éléments de sa vie, à des événements tristes ou gais, alternant ainsi mélancolie et fantaisie.
II. La modernité poétique
1) Entre tradition et modernité
Le passage entre le XIXe et le XXe siècle correspond à une période d’innovations technologiques : électricité, automobile, tour Eiffel, première ligne de métro, etc. Les éléments du monde moderne deviennent des objets poétiques.
Pour dire ces réalités nouvelles, Apollinaire, comme Cendrars, travaillent sur la forme : absence de ponctuation, vers libres, poésie visuelle qui tient compte de l’espace de la page et qui trouvera son aboutissement dans les Calligrammes.
Citation
« Mais nos pieds ne se détachent qu’en vain du sol qui contient les morts. » (Apollinaire, Les Méditations esthétiques.)
Mais la modernité ne signifie pas le rejet du passé et des formes anciennes. Au contraire, le vers libre côtoie des formes plus classiques. De même, les thématiques mêlent références antiques ou bibliques aux tramways et aux rails.
2) Un nouveau lyrisme
Apollinaire se dit « en quête d’un lyrisme neuf et humaniste en même temps » (Lettre à Toussaint-Luca, 1908). Dans L’Esprit nouveau et les Poètes, il affirme que « les poètes modernes sont […] des créateurs, des inventeurs et des prophètes. »
Ce nouveau lyrisme est souvent celui d’un « je » composite à la manière des portraits cubistes qui donnent à voir plusieurs facettes d’un personnage en même temps. Il est aussi polyphonique, comme dans « Cortège » dans lequel le poète à la recherche de lui-même « connaî[t] les autres » et nous fait entendre leurs voix.