Les autorités de conseil et de contrôle de l'État

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Dans un État de droit, différentes institutions veillent au bon fonctionnement de l’État. En France, la Constitution de 1958 confère au Conseil constitutionnel la mission de vérifier la conformité des lois à la Constitution et attribue à la Cour des comptes le rôle de contrôler la gestion des administrations. De plus, différentes institutions ont une mission de conseil auprès de l’État alors que d’autres agissent davantage dans le cadre d’un contrôle de l’État pour garantir son impartialité et la transparence de l’action publique.


1 - Les autorités de conseil de l'État

Les organismes chargés d’une mission de conseil auprès de l’État sont multiples : le Conseil d’État, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM), le Conseil écono- mique, social et environnemental (CESE), le Conseil consultatif national d’éthique (CCNE), etc.

A - Le Conseil d'État

Outre sa fonction juridictionnelle, le Conseil d’État est le conseiller du gouvernement pour la préparation des projets de loi, d’ordonnance et de certains décrets.
Toutefois, le gouvernement n’est pas tenu de suivre l’avis du Conseil d’État.

Le Conseil d’État est obligatoirement saisi de tous les projets de loi, avant leur adoption par le Conseil des ministres et leur dépôt devant le Parlement (article 39 de la Constitution). Il doit être saisi des projets d’ordonnance avant leur adoption par le Conseil des ministres (article 38 de la Constitution). Quant aux décrets en Conseil d’État, ils ne peuvent être pris ou modifiés qu’après la saisine du Conseil d’État.

Le rôle consultatif du Conseil d’État est important. Il traite également des demandes d’avis du gouvernement et peut, à sa propre initiative, effectuer des études. Il est aussi le conseiller du Parlement sur les propositions de loi.

Le Conseil d’État adresse chaque année au président de la République un rapport public (consultable sur le site internet www.conseil-etat.fr).

B - Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM)

Selon l’article 64 de la Constitution, le président de la République est garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire et il est assisté par le Conseil supérieur de la magistrature. Le CSM est prévu à l’article 65 de la Constitution.

Il comprend une formation compétente à l’égard des magistrats du siège et une formation compétente à l’égard des magistrats du parquet.

Il se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d’avis formulées par le président de la République, se prononce sur les questions relatives à la déontologie des magistrats et sur toute question relative au fonctionnement de la justice dont le saisit le ministre de la Justice.

Sauf en matière disciplinaire, le ministre de la Justice peut participer aux séances des formations du CSM.

Le CSM peut être saisi par un justiciable s’il estime que le comportement d’un magistrat, au cours d’une procédure judiciaire le concernant, et dans l’exercice de ses fonctions, est susceptible d’une qualification disciplinaire.

C - Le Conseil économique, social et environnemental (CESE)

Le CESE est une assemblée consultative prévue aux articles 69 à 71 de la Constitution. Il est qualifié de « troisième assemblée constitutionnelle de la République » car il permet l’expression de la société civile.

Les missions du CESE sont notamment de conseiller le gouvernement et le Parle- ment, de participer à l’élaboration et à l’évaluation de la politique économique, sociale et environnementale.

La loi constitutionnelle de juillet 2008 et la loi organique de juin 2010 donnent aux citoyens la possibilité de saisir le CESE par voie de pétition sur toute question à caractère économique, social et environnemental.

Les travaux du CESE sont consultables sur le site internet www.lecese.fr.

Le CESE s’est vu confier l’organisation de la Convention citoyenne pour le climat, décidée par le président de la République. Elle a débuté en octobre 2019 et regroupait 150 citoyens tirés au sort. Leur mandat consistait à proposer des mesures visant à « réduire d’au moins 40 % les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, dans un esprit de justice sociale ». Les 149 propositions de la Convention citoyenne pour le climat ont été remises en juin 2020.

Une réforme du CESE est en cours. En effet, le projet de loi organique relatif au CESE a été présenté au Conseil des ministres le 7 juillet 2020 par le ministre de la Justice. Le gouvernement a engagé la procédure accélérée et ce texte a été définitivement adopté par le Parlement le 16 novembre 2020. Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 décembre 2020.

Les missions du CESE sont redéfinies :

  • éclairer les pouvoirs publics sur les enjeux économiques, sociaux et environnementaux ;
  • accueillir et traiter les pétitions citoyennes ;
  • devenir le carrefour des consultations publiques.​

La composition du CESE est réduite à 175 membres (les 40 personnalités qualifiées désignées par le gouvernement sont supprimées). Ce projet de loi consacre le CESE comme carrefour des consultations publiques et lui confère la possibilité d’organiser la consultation des citoyens.

D - Le Conseil consultatif national d'éthique (CCNE)

En 1983, la France a créé, sous la présidence de François Mitterrand, le Conseil consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE). La loi du 6 août 2004 lui a conféré le statut d’autorité indépendante et, postérieurement, ses compétences ont été étendues par le législateur, notamment par la loi du 7 juillet 2011 (articles L1412-1 à L1412-6 du Code de la santé publique).

1) La composition du CCNE

Le CCNE est composé de 39 membres nommés pour 4 ans, renouvelable une fois :

  • 5 personnalités désignées par le président de la République et appartenant aux principales familles philosophiques et spirituelles ;​
  • 19 personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence et de leur intérêt pour les problèmes d’éthique ;
  • 15 personnalités appartenant au secteur de la recherche.
Le président du CCNE est nommé par le président de la République pour 2 ans renouvelable. Le professeur Jean-François Delfraissy a été reconduit dans ses fonctions de président du CCNE (il préside le CCNE depuis 2017).


2) Les missions du CCNE

Le CCNE rend compte de son activité au président de la République et au Parlement (le rapport d’activité 2019-2020 est consultable sur le site internet www.ccne-ethique.fr). Il peut publier des recommandations sur les sujets relevant de sa compétence.

Le CCNE a notamment pour rôle d’organiser un débat public, sous forme d’états généraux, pour tout projet de réforme sur les problèmes éthiques et les questions de société soulevés par les progrès de la connaissance dans les domaines de la biologie, de la médecine et de la santé. En l’absence de projet de réforme, le CCNE est tenu d’organiser des états généraux de la bioéthique au moins une fois tous les 5 ans.

2 - Les autorités indépendantes 

Les autorités indépendantes ont un rôle essentiel en matière de protection des droits et libertés. Elles se sont développées en France à partir des années 1970 avec la création de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). La notion d’autorité administrative indépendante (AAI) est alors apparue.

Selon le Conseil d’État, les AAI sont des « organismes administratifs qui agissent au nom de l’État et disposent d’un réel pouvoir, sans pour autant relever de l’autorité du gouvernement ».

A - Les principes généraux des autorités indépendantes

Les autorités indépendantes sont diverses. Il s’agit notamment de la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA), du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, du Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Le Défenseur des droits est une autorité constitutionnelle indépendante.

Elles disposent d’un pouvoir d’influence (pouvoir d’avis, de proposition, de recommandation) et pas uniquement d’un pouvoir consultatif. Certaines autorités indé- pendantes bénéficient d’un pouvoir de sanction.

Elles font partie de l’administration de l’État car elles agissent au nom et pour le compte de l’État mais elles sont indépendantes. Cela signifie qu’elles ne sont pas subordonnées au gouvernement. Elles ne peuvent pas recevoir d’ordre ou d’instruction du gouvernement.

B - Le Défenseur des droits

1) L'origine du Défenseur des droits

Le Défenseur des droits est une autorité constitutionnelle indépendante (article 71-1 de la Constitution). Sa création date de la révision constitutionnelle de 2003 et correspond à la fusion de quatre institutions : le Médiateur de la Répubique, le Défenseur des enfants, la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) et la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS).

Le Défenseur des droits a été institué en 2011. Il est nommé par le président de la République pour une durée de 6 ans, non renouvelable et non révocable. Le premier Défenseur des droits était Dominique Baudis. Depuis juillet 2020, la Défenseure des droits est Claire Hédon, nommée par le président de la République, Emmanuel Macron. Elle a succédé à Jacques Toubon, Défenseur des droits de 2014 et 2020 et nommé par François Hollande.

2) Les missions

La mission du Défenseur des droits est de veiller au respect des droits et libertés par les administrations de l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics, ainsi que par tout organisme investi d’une mission de service public, ou à l’égard duquel la loi organique lui attribue des compétences.
Pour exercer cette mission, le Défenseur des droits est assisté par 3 collèges et de 4 adjoints :

  • le collège « Déontologie de la sécurité », qui a borde les règles de bonne conduite des représentants de l’ordre, qu’ils soient publics ou privés ; Pauline Caby, adjointe chargée du respect de la déontologie par les professionnels de la sécurité ;
  • le collège « Défense et promotion des droits de l’enfant », qui est compétent pour tout ce qui a trait aux intérêts des enfants ; Éric Delemar, adjoint chargé de la défense et de la promotion des droits de l’enfant ;​
  • le collège « Lutte contre les discriminations et promotion de l’égalité », qui travaille sur la défense des personnes discriminées et l’accès aux droits pour tous et toutes ; George Pau-Langevin, adjointe chargée de la lutte contre les discriminations et de la promotion de l’égalité ;
  • Daniel Agacinski, adjoint au Défenseur des droits, délégué général à la médiation avec les services publics.

3) La saisine

En matière de saisine, le Défenseur des droits peut être saisi par toute personne qui considère que ses droits ont été lésés mais il peut aussi se saisir d’office.

Le Défenseur des droits rend compte de son activité au président de la République et au Parlement (le rapport annuel d’activité 2019 est consultable sur le site internet www.defenseurdesdroits.fr).

C - Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est une autorité administrative indépendante instituée par la loi du 30 octobre 2007.

1) La nomination du Contrôleur général

Il est nommé par le président de la République pour une durée de 6 ans, non renouvelable et non révocable ; il ne peut être mis fin à ses fonctions avant l’expiration de son mandat qu’en cas de démission ou d’empêchement. Adeline Hazan avait été nommée le 16 juillet 2014. Son mandat s’est achevé et Dominique Simonnot a été nommée Contrôleuse générale des lieux de privation de liberté le 14 octobre 2020.

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté ne peut pas être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions qu’il émet ou des actes qu’il accomplit dans l’exercice de ses fonctions.

2) Les missions du Contrôleur ​

La mission du Contrôleur général des lieux de privation de liberté est de veiller à ce que les personnes privées de liberté soient traitées avec humanité et dans le respect de la dignité inhérente à la personne humaine.

Pour exercer sa mission, il peut visiter, à tout moment, sur l’ensemble du territoire français, tout lieu où des personnes sont privées de liberté :

  • établissements pénitentiaires ;
  • établissements de santé recevant des personnes hospitalisées sans leur consentement ;
  • locaux de garde à vue des services de police et de gendarmerie ;
  • locaux de rétention douanière ;
  • centres de rétention administrative des étrangers ;
  • zones d’attente des ports et aéroports ;
  • centres éducatifs fermés ;
  • tout véhicule permettant le transfert des personnes privées de liberté.

Toute personne physique, ainsi que toute personne morale s’étant donné pour objet le respect des droits fondamentaux, peut porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence.


3) La saisine

Le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est saisi par le Premier ministre, les membres du Gouvernement, les membres du Parlement, les représen- tants au Parlement européen élus en France et le Défenseur des droits.

Il peut aussi se saisir de sa propre initiative.

Le rapport annuel d’activité 2022 du Contrôleur général des lieux de privation de liberté est consultable sur le site internet www.cglpl.fr.