La montée en puissance de l’intercommunalité

Signaler

La montée en puissance de l’intercommunalité fédérative

Au 1er janvier 2019, la France compte 1 258 établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre : 21 métropoles, 13 communautés urbaines, 223 communautés d’agglomération et 1 001 communautés de communes. Le nombre d’EPCI à fiscalité propre a été divisé par deux en 10 ans. Seules quatre communes de France métropolitaine ne sont pas membres d’un EPCI à fiscalité propre (îles monocommunales, bénéficiant d’une dérogation législative : île d’Yeu, île de Bréhat, île de Sein, île d’Ouessant).

Vers la fin du millefeuille territorial ?

L’Acte III de la décentralisation entend mettre un terme au millefeuille territorial à la française, coûteux et peu efficace. Deux entités deviennent centrales, les régions et les métropoles, alors que l’intercommunalité fédérative confirme sa montée en puissance. Quant aux départements, ils restent maintenus avec un centrage affirmé sur le domaine de la solidarité sociale.

La valorisation des régions et des métropoles

  • Depuis le 1 janvier 2016, le nombre de régions métropolitaines est réduit de 22 à 13 afin de les renforcer et leurs compétences sont étendues. Quant aux métropoles, 10 ont été créées au 1er janvier 2015 (Rennes, Bordeaux, Toulouse, Nantes, Brest, Lille, Rouen, Grenoble, Strasbourg, Montpellier) auxquelles s’ajoute la Métropole de Lyon (statut particulier). Les métropoles du Grand Paris et d’Aix-Marseille-Provence ont vu le jour le 1er janvier 2016.
  • La montée en puissance de l’intercommunalité fédérative
  • L’intercommunalité fédérative s’inscrit dans un projet de territoire. Depuis le 1er janvier 2014, toute commune adhère obligatoirement à un EPCI à fiscalité propre (approche qualifiée de « marche forcée » vers l’intercommunalité fédérative).
  • L’élection des conseillers intercommunaux lors des élections municipales de 2014 (fléchage), a renforcé la dimension démocratique de l’intercommunalité fédérative.
  • Le développement des transferts de compétence des communes aux EPCI à fiscalité propre emporte une diminution de l’intercommunalité associative et réduit les domaines de compétence des communes. De plus, dans de nombreux domaines, les transferts de compétences s’accompagnent d’un transfert du pouvoir de police spéciale des maires au président d’EPCI à fiscalité propre.
  • Le relèvement du seuil de l’intercommunalité (de 5 000 à 15 000 habitants), renforce l’intercommunalité fédérative autour de bassins de vie plus étendus.

Vers une mutation de l’intercommunalité à la supracommunalité ?

Alors qu’à l’origine, l’intercommunalité garantissait les prérogatives des communes (logique de coopération), l’intercommunalité fédérative tend, de plus en plus, à opérer un déplacement du pouvoir au nom de l’intérêt communautaire.

L’intérêt communautaire devient une notion centrale et tend à opérer une mutation de l’intercommunalité classique vers la supracommunalité.

Cette évolution questionne sur un changement de statut des EPCI à fiscalité propre vers celui de collectivité territoriale. Ils bénéficieraient ainsi du principe de libre administration, dont seules les collectivités territoriales sont bénéficiaires.

Parallèlement, les départements et les régions pourraient glisser vers le statut d’établissement public, soumis au principe de spécialité. La suppression de la clause de compétence générale pour les départements et les régions va dans ce sens. Selon le rapport du commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), de janvier 2015, « à terme, la clause de compétence générale des communes devrait être transférée aux EPCI, qui seraient élus au suffrage universel direct » (rapport sur les EPCI, « La taille des EPCI, un levier d’action pour la politique d’égalité des territoires »). Par ailleurs, selon ce rapport, « finalement les politiques publiques, et notamment les outils de financement et de péréquation comme la DGF et autres dotations, devront être attribuées globalement à l’échelle des EPCI (et non plus des communes) ».

Quant aux communes, leur avenir se joue peut-être dans le statut de la « commune nouvelle ».

La commune nouvelle : une opportunité pour l’avenir des communes ?

L’échec de la loi du 16 décembre 2010 réformant la commune nouvelle

La loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales a rénové le processus de regroupement de communes (fusion de communes) prévu par la loi du 16 juillet 1971 (dite « loi Marcellin ») pour instituer une démarche volontaire à travers la commune nouvelle. Ce regroupement volontaire de communes n’a cependant pas connu un grand succès.

  • Juridiquement, la commune nouvelle est une forme particulière de commune, soumise, en principe, aux règles de droit commun applicables aux communes. Elle permet un regroupement communal volontaire mais elle ne se confond, ni se substitue à l’intercommunalité.
  • La commune nouvelle s’applique à des communes contiguës et peut concerner tout ou partie de communes regroupées au sein d’un EPCI à fiscalité propre.
  • Entre 2011 et 2014, 25 communes nouvelles ont été créées. La première fut la commune nouvelle de Bleury-Saint-Symphorien, en 2011, regroupant 2 communes fondatrices.
  • Durant l’année 2013, la création de communes nouvelles était impossible en raison du renouvellement des conseils municipaux en 2014.

La loi du 16 mars 2015 relative à l’amélioration du régime de la commune nouvelle, pour des communes fortes et vivantes

La loi du 16 mars 2015 vise à rendre plus attractif le dispositif de création de la commune nouvelle. Elle a été adoptée dans le cadre de la procédure accélérée et est issue de deux propositions de loi (n° 2241 du 3 octobre 2014 de Bruno Le Roux, n° 2244 du 7 octobre 2014 de Jacques Pélissard).

Les principes clés posés par la loi du 16 mars 2015 sont, notamment :

  • le maintien de la procédure de création d’une commune nouvelle issue de la loi de 2010 ;​
  • la mise en place d’un régime transitoire de gouvernance entre la création de la commune nouvelle et le prochain renouvellement des équipes municipales ;
  • les incitations financières : pour les communes nouvelles créées au plus tard le 1er janvier 2016 et regroupant soit toutes les communes d’un ou de plusieurs EPCI, soit une population totale égale ou inférieure à 10 000 habitants, la dotation est maintenue pour 3 ans. De plus, pour les communes nouvelles dont la population est comprise entre 1 000 et 10 000 habitants, la dotation forfaitaire est majorée de 5 % sur 3 ans.

Au-delà des avantages financiers et fiscaux en cas de constitution avant le 1er janvier 2016, différents enjeux sont identifiés :

  • une solution à l’émiettement communal, en mutualisant les moyens et les institutions, tout en maintenant l’identité de chaque commune ;​
  • disposer d’une influence suffisante au sein d’EPCI à fiscalité propre au périmètre élargi (seuil de création de 15 000 habitants, loi NOTRe de 2015) ;
  • créer des communes plus fortes dans des intercommunalités de projet ;
  • favoriser une meilleure gestion des deniers publics et une meilleure rationalisation de l’action publique ;
  • le maintien de la proximité, caractère indispensable de l’échelon communal mais dans un cadre rénové ;
  • favoriser le regroupement avec une ville centre.

Les EPCI à fiscalité propre progressent de plus en plus vers le statut de collectivité territoriale à part entière. Certains évoquent la possibilité d’une évolution des communes nouvelles qui pourraient devenir des sections de l’intercommunalité.

La loi n° 2016-1 500 du 8 novembre 2016 tendant à permettre le maintien des communes associées, sous forme de communes déléguées, en cas de création d’une commune nouvelle prévoit, en outre, notamment d’attribuer au moins autant de sièges à la commune nouvelle, au sein du conseil communautaire de l’EPCI qu’elle rejoindra, que de communes qui l’ont rejointe (disposition transitoire jusqu’en 2020).

À noter qu’une proposition de loi sénatoriale visant à adapter l’organisation des communes nouvelles à la diversité des territoires a été déposée en décembre 2018 (Sénat n° 180, session 2018-2019). Elle entend améliorer le fonctionnement des communes nouvelles et mieux articuler leur développement avec l’intercommunalité. Cette proposition de loi entend lever certaines freins à la création d’une commune nouvelle. Elle propose une transition plus graduelle vers le droit commun (assouplissement des contraintes et diversification des modes d’organisation territoriale par la création de la « commune-communauté »).

Surfez sur Internet

L’intercommunalité pour quoi faire ?
www.viepublique.fr

Les Français et l’intercommunalité : 3 sur 4 sont satisfaits du travail accompli par leur communauté
www.adcf.org