Écoles d’ingénieurs : les admissions parallèles après un BUT seront-elles plus difficiles ?
L’arrêté du 6 décembre 2019 avait officiellement acté la création du BUT (Bachelor Universitaire de Technologie) dans les IUT. Cette nouvelle licence universitaire est lancée dès la rentrée 2021. Délivrant un diplôme à bac+3, elle devait notamment faciliter l’entrée d’étudiants dans les bachelors des grandes écoles d’ingénieurs.
Pour rappel, un diplôme d’ingénieur se prépare généralement en deux temps. D’abord avec un premier cycle de deux ans, en CPGE, prépa intégrée ou en préparant un diplôme bac+2. Puis avec trois d’études en « cycle ingénieurs ». Les étudiants reçoivent leur diplôme et le titre d’ingénieur au terme de ces cinq années.
Or, le 27 avril 2021, la CDEFI (Conférences des Directeurs des Écoles Françaises d’Ingénieurs) a provoqué un coup de tonnerre dans le monde universitaire.
Une admission en 1re année de cycle ingénieurs pour les titulaires de BUT ?
D’après un communiqué officiel, la CDEFI a décidé que « la poursuite d’études des futurs titulaires d’un BUT dans les écoles d’ingénieurs la plus adéquate était celle d’une admission en 1re année de cycle ingénieur ».
L’organisme justifie ce choix par une volonté d’attribuer « le niveau d’entrée le plus adapté pour les titulaires d’un DUT ou d’un BUT en cycle ingénieur, ceci afin de leur garantir toutes les chances de réussite ».
Autre décision de la CDEFI : le niveau d’entrée des titulaires d’un DUT (bac+2) et d’un BUT (bac+3) dans les écoles d’ingénieurs sera identique. Une double annonce qui n’a pas manqué de mettre le feu aux poudres.
Les universités ripostent
Le 30 avril dernier, la CPU (Conférence des présidents d’universités) a publié une réponse au titre sans équivoque sur son site officiel. En effet, elle y « dénie à la CDEFI toute compétence pour se prononcer sur la valeur des diplômes universitaires. »
Le CPU explique que les étudiants diplômés d’un BUT ont validé le niveau bac+3. L’admission en deuxième année de cycle ingénieur est donc logique.
« Pour la CPU, il est inadmissible que les étudiants du premier cycle universitaire, qu’il s’agisse, comme ici, du nouveau diplôme du BUT, ou bien de la licence générale, soient contraints de perdre une année lorsqu’ils font le choix d’une entrée en école, sur l’injonction ou la pression, illégitimes, d’une conférence d’établissements », indique le communiqué.
L’association pointe également du doigt l’augmentation des bachelors d’ingénieurs cherchant à obtenir le grade licence. Elle accuse la CDEFI de « détourner des flux étudiants vers ses propres bachelors ».
La réponse de la CDEFI
Face à l’indignation des universités, le président de la CDEFI Jacques Fayolle a apporté des éclaircissements sur la position de l’association par voie de presse.
« Les titulaires d’une licence professionnelle sont déjà admis en 1re année de cycle ingénieur et non pas en 2e année. Le BUT est une licence professionnelle, a-t-il déclaré dans un entretien accordé à l’AEF. De même, un diplômé de licence générale intègre très généralement une école d’ingénieurs en 1re année de cycle ingénieur. Il peut bien sûr y avoir quelques exceptions mais elles sont très rares. Les admis sur titres qui intègrent nos écoles en 2e année de cycle ingénieur sont les titulaires d’un M1. »
D’après ce même entretien, la CDEFI propose donc de « recruter en LP comme elle l’a toujours fait : en 1re année de cycle ingénieur ».
« En l’état de nos connaissances, les programmes du BUT ne sont pas tous finalisés. Et le niveau de compétences qui est visé à bac+2 sera différent de celui d’aujourd’hui à l’issue d’une 2e année en IUT, a justifié Jacques Fayolle. C’est normal puisque la formation est désormais conçue sur trois années au lieu de 2+1. Par ailleurs, sur les deux premières années de BUT, le nombre heures de formation n’est plus tout à fait le même qu’en DUT. Si on regarde globalement les compétences effectivement visées, on se dit qu’intégrer un apprenant de 2e année de BUT ne sera a priori plus possible si on ne souhaite pas le mettre en difficulté. »
Les écoles d’ingénieurs moins accessibles aux bacheliers technologiques ?
La question des admissions parallèles après un BUT se pose donc. En effet, les diplômés de licence seront-ils tentés par l’idée de poursuivre leur cursus en école d’ingénieurs en repassant par une 3e année ? De plus, en optant pour un BUT, les bacheliers pourraient désormais penser qu’il sera encore plus compliqué de continuer leur parcours dans une grande école.
Selon la CPU, les BUT sont pourtant le moyen d’intégrer les bacheliers technologiques « au sein d’un parcours de réussite dense et exigeant » que sont les parcours universitaires. Et, à terme, les grandes écoles. Selon la loi du 8 mars 2018 pour l’égalité des chances, un taux minimal de bacheliers technologiques est retenu pour l’accès aux IUT sur Parcoursup.
La décision de la CEDFI est-elle irrévocable ? En tout cas, le débat est loin d’être terminé.