Les causes et les conséquences du décrochage des jeunes invisibles
digiSchool et ses partenaires déploient des maraudes numériques visant à “repérer et mobiliser les jeunes invisibles” dans le cadre d’un appel à projet PIC (Plan d’Investissement dans les compétences). Pour mieux comprendre ce phénomène, nous vous proposons un éclairage de Claire Bernot-Caboche, sociologue spécialiste des jeunes invisibles.
SOMMAIRE
Les causes d’entrée en invisibilité des jeunes
Le parcours d’insertion des jeunes n’est plus un processus naturel qui voudrait qu’une bonne éducation, suivie d’une bonne formation amène systématiquement à un bon emploi permettant une prise d’autonomie durable et rapide. Ce triptyque s’est transformé en quadriptyque, une bonne éducation, une bonne formation, un bon emploi, quadrillé de ruptures et d’aller-retour menant à l’invisibilité pour une trop grande partie.
« Presqu’un tiers des jeunes est aujourd’hui en difficulté d’insertion entre 15 et 29 ans. »
Les causes d’entrée en invisibilité (ni en éducation, ni en formation, ni en emploi et ni en accompagnement) sont multiples et souvent cumulées. Elles peuvent être du domaine personnel, familial, scolaire ou sociétal et, plus particulièrement, provenir de la discrimination, du harcèlement, des inégalités (inégalités de territoire, discrimination filles/garçon, accès à l’offre jeunesse…), d’un handicap non pris en compte ou non assumé, d’une addiction non repérée ni traitée, d’une orientation scolaire ou professionnelle non consentie, d’une difficulté à recourir à ses droits ou encore, tout simplement, d’un décrochage scolaire non détecté, etc… Chacune de ces causes alimente le processus de retrait social.
Les risques associés : entrée en invisibilité
Lorsque le processus de décrochage scolaire, ou de la vie, est enclenché, il devient urgent d’agir pour éviter l’inscription durable dans l’invisibilité, car les difficultés à s’en sortir se durcissent avec le temps. L’injonction ne fonctionne pas, le jeune totalement à l’arrêt a besoin d’être accompagné longuement pour se remettre en mouvement. En 2019, plus de 700 000 jeunes étaient en invisibilité totale, dont 9/10 habitent en milieu diffus, en dehors des zones urbaines sensibles, et 4/10 sont issus d’un milieu plutôt favorisé (d’où une méconnaissance de l’offre d’insertion), ce qui remet totalement en cause les normes sociales : “il y a toujours un ascenseur social en vigueur mais un descendeur social s’est mis en route”.
Les conséquences de l’entrée en invisibilité apportent systématiquement de la souffrance aux jeunes et à leur entourage proche. Nous pouvons également observer un double paradoxe puisque d’un côté ils se mettent en « mode protection » pour que rien ne les atteigne, et de l’autre ils sont capables de s’auto-mutiler (prises de risques inconsidérées, addictions démesurées, piercing multiples, scarifications, tatouages,…), la souffrance physique masquant alors la souffrance psychique due à leur sentiment d’« inutilité sociale ».
Solutions / bonnes pratiques : gérer « l’aller vers » et l’accès aux droits
Le changement de sociologie des jeunes « invisibles » oblige les acteurs de terrain et les acteurs publics à changer de modèle d’accompagnement : il ne faut plus attendre les jeunes dans les structures de proximité mais aller les chercher dans les territoires diffus. Les acteurs doivent alors se faire connaître du public, les territoires doivent organiser l’offre pour que chaque jeune soit à égalité de connaissance et d’accès à ses droits et ce, quel que soit son lieu d’habitation. Cela nécessite un diagnostic précis de l’offre jeunesse du territoire et des besoins personnalisés des jeunes.
Pour accompagner le mouvement, digiSchool et ses partenaires proposent le 1er baromètre de l’insertion des jeunes.
Vous voulez en savoir davantage sur les jeunes invisibles ou sur le projet de maraudes numériques ? Contactez-nous sur digineet@digischool.fr.