I. La recherche d'un avantage concurrentiel
Pour atteindre ses objectifs, toute organisation doit opérer un certain nombre de choix stratégiques, qui constituent des axes d’évolution à moyen et long terme.
Les décisions relatives aux orientations stratégiques de l’entreprise sont fondamentales : la réussite (ou l’échec) d’une entreprise dépend souvent de sa capacité à définir une stratégie pertinente, qui tient compte de ses ressources et de l’évolution de son environnement.
Il appartient à chaque entreprise de déceler et d’étudier les sources potentielles d’un avantage concurrentiel (ou compétitif). L’avantage peut résulter de la dimension de l’entreprise (exemples : économies d’échelle, effets de synergie…) ou de ses ressources (exemples : innovation, progrès technique, potentiel humain…).
À savoir
Théorisé par Michael Porter en 1985, l’avantage concurrentiel, ou avantage compétitif, est l’élément qui différencie fondamentalement l’offre d’une entreprise par rapport à ses concurrents, et qui constitue donc sa puissance de différenciation. La stratégie mise en place par une entreprise doit contribuer à la création puis à la pérennité de cet avantage.
Une entreprise peut segmenter l’ensemble de ses activités en différents domaines d’activité stratégique (DAS) dans lesquels sont menées des stratégies adaptées. Les choix stratégiques s’opèrent donc au niveau global et au niveau de chacun des domaines d’activités (construction de l’avantage concurrentiel par différenciation-sophistication-épuration ou par domination par les coûts, choix de marchés pertinents, etc.).
Le caractère éphémère de l’avantage concurrentiel (incertitude de l’environnement, intensité de la concurrence, rythme des innovations technologiques, etc.) conduit les entreprises à rechercher en permanence des innovations afin de recréer de nouveaux avantages compétitifs.
À savoir
Un DAS (ou segment stratégique) est constitué d’un ensemble homogène de biens et/ou services proposés par l’entreprise, destinés à un marché spécifique ayant des concurrents déterminés et pour lequel il est possible de formuler une stratégie spécifique.
En pratique, il appartient à l’entreprise de définir des critères de segmentation permettant un découpage des activités. Cette opération de découpage est très importante car elle conditionne les orientations stratégiques futures.
II. Les stratégies globales
Au niveau global, une entreprise peut arbitrer entre une stratégie de spécialisation ou une stratégie de diversification.
1) La stratégie de spécialistion
La spécialisation est la stratégie par laquelle une organisation limite son activité à un domaine spécifique, souvent fondé sur une compétence ou une technologie unique, pour développer un avantage concurrentiel.
Une entreprise suivant une telle stratégie peut en attendre 4 avantages : réalisation d’économies d’échelle ; création d’effet d’expérience et de synergies ; obtention de la taille critique (ou nécessaire) dans la spécialité concernée ; consolidation de l’image.
La réussite d’une stratégie de spécialisation dépend de plusieurs conditions :
- le domaine d’activité doit être en phase de croissance ;
- les compétences et technologies mises en œuvre doivent être parfaitement dominées et actualisées.
De plus, l’entreprise reste vulnérable aux aléas conjoncturels et aux ruptures technologiques.
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Stratégie : se spécialiser ou se diversifier ?
2) La stratégie de diversification
La diversification consiste à ajouter de nouveaux métiers aux activités actuelles de l’organisation. Cette stratégie est très répandue dans la vie des entreprises car elle permet de répartir et donc de réduire les risques. Elle contribue également à améliorer la rentabilité de l’entreprise en l’orientant vers de nouveaux marchés plus porteurs.
Exemple
Pendant longtemps, l’activité de la Fnac s’est limitée à la commercialisation de produits culturels : livres, disques… Mais le nouveau dirigeant du groupe a entrepris une stratégie de diversification horizontale qui conduit à proposer aux clients des robots ménagers, des produits de papeterie, etc.
La diversification peut être technique (nouvelles matières ou nouveaux procédés de fabrication…) ou commerciale (offre de nouveaux produits et/ou recherche de nouveaux segments de clientèle).
À savoir
On parle de diversification horizontale lorsqu’on élargit progressivement la gamme de produits tout en conservant la même clientèle, le même marché. À l’inverse, la diversification verticale conduit à étendre la vente du produit actuel à une nouvelle clientèle sur de nouveaux marchés. La diversification concentrique combine les 2 axes précédents.
Avant la mise en œuvre de la diversification, l’entreprise doit arbitrer entre les différentes options de diversification (choix du secteur, évolution du métier).
La diversification peut entraîner des risques : réactions des concurrents, coûts élevés, compétences techniques insuffisantes…
III. Les stratégies de domaine
D’après Porter, une entreprise, pour chacun de ses domaines d’activité stratégique (DAS), peut opter pour l’une des 4 stratégies suivantes :
1) La stratégie de domination par les coûts
Elle consiste à proposer une offre dont le coût est inférieur à celui des concurrents, ce qui permet de réduire les prix et donc d’accroître la part de marché. Si la méthode de réduction des coûts utilisée est imitable par les concurrents, elle ne procure pas de véritable avantage.
2) La stratégie de différenciation
La stratégie de différenciation consiste à proposer une offre ayant des caractéristiques différentes de celle de la concurrence. Il existe 2 types de différenciations :
- la différenciation vers le haut ou sophistication, consiste à proposer une offre plus élaborée que l’offre de référence, mais à la vendre à un prix plus élevé. L’idéal consiste à augmenter le prix plus que le coût, afin de générer un profit supérieur. C’est le positionnement adopté notamment par Apple, BMW ou Häagen-Dazs.
- la différenciation vers le bas ou épuration, consiste au contraire à proposer une offre moins qualitative que l’offre de référence, mais à la vendre à un prix moins élevé. L’idéal consiste alors à réduire le coût plus que le prix, afin de générer un profit supérieur. C’est le positionnement adopté notamment par Bic, Ikea ou Ryanair.
3) La stratégie de focalisation
Elle consiste à centrer l’essentiel de ses efforts sur un segment de marché de petite taille, afin d’éviter l’affrontement avec les plus puissants concurrents. On parle alors également de « stratégie de niche ». Cela conduit à choisir sur ce créneau une stratégie de domination par les coûts ou de différenciation. C’est le positionnement adopté notamment par les skis Lacroix (skis de luxe) ou par Meccamo (carburants pour modélisme).
IV. Le développement de l'entreprise et la chaîne de valeur
1) Une analyse de la chaîne de valeur
Elle permet de distinguer les activités de base créatrices de valeur des fonctions dites de support. Cette analyse donne à l’entreprise la faculté de mieux percevoir les sources de coût et de valeur, et donc ce qui la démarque de ses concurrents.
2) Les choix stratégiques
Ils portent également sur les maillons de la chaîne de valeur que l’entreprise souhaite maîtriser (intégration, externalisation) et sur les modalités de son développement (croissance externe, croissance interne, partenariats), y compris à l’international.
3) L’intégration
Elle consiste, pour une organisation, à effectuer un regroupement avec d’autres entreprises, dans le but de réaliser elle-même des activités nouvelles au sein de sa filière de production. Par exemple, un éditeur qui se regroupe avec une imprimerie réalise une opération d’intégration. L’intégration peut s’effectuer dans 3 directions principales : en amont, vers les approvisionnements ; en aval vers les débouchés ; latérale, vers des activités périphériques (centres de recherche, sociétés de financement…).
Lorsque l’entreprise poursuit un objectif d’intégration complète en amont et en aval, on parle de stratégie de filière.
L’intégration peut obéir à une logique industrielle : il s’agit de maîtriser toutes les étapes du cycle d’exploitation grâce à un contrôle des fournisseurs et des distributeurs. Mais souvent, l’intégration est liée à une logique financière : il s’agit alors d’un choix d’investissement destiné à améliorer la rentabilité de l’entreprise.
À savoir
Quelle que soit la modalité juridique (fusion, absorption…), l’intégration peut générer des effets négatifs pour l’entreprise : réduction de la flexibilité, coût d’entrée et augmentation des coûts fixes. De plus, l’entreprise doit maîtriser de nouvelles compétences liées aux activités intégrées et la coordination de l’ensemble des activités est essentielle. Enfin, les rigidités créées rendent la firme plus sensible aux risques conjoncturels (activité cyclique, changements technologiques…).
4) L’externalisation
Elle consiste à recourir au marché pour faire faire une activité réalisée jusque-là en interne par l’organisation. Beaucoup d’entreprises, dans le cadre de stratégies de recentrage sur leur métier principal, tendent à abandonner à des tiers des activités auxiliaires comme l’entretien des locaux, la restauration du personnel, la sécurité, les traitements informatiques (confiés à des sociétés d’infogérance), etc.
La stratégie d’externalisation s’accompagne souvent de délocalisation des activités confiées aux entreprises prestataires, parfois à l’étranger (exemple : centres d’appel en Irlande), et du recours au travail à distance (télétravail).
Certaines entreprises poussent à l’extrême la logique d’externalisation pour ne conserver que les activités les plus stratégiques (exemple : Coca-Cola vend les concentrés aux fabricants et garde la maîtrise de sa politique de communication) ou dégageant la plus forte valeur ajoutée.
À savoir
Il n’est pas rare que des entreprises qui ont externalisé une ou plusieurs activités entreprennent la démarche inverse et réintègrent l’activité concernée. L’externalisation présente en effet de nombreux risques : coûts cachés, perte de savoir-faire, dépendance à l’égard de fournisseurs, coûts sociaux…
5) Les stratégies de croissance
La plupart des entreprises cherchent à se développer. La croissance d’une entreprise peut se définir comme l’augmentation des dimensions et le changement des caractéristiques de l’entreprise (produits, marchés, technologies, financement, ressources humaines, organisation). Il s’agit donc d’un double processus quantitatif (les dimensions augmentent) et qualitatif (les structures changent). Il existe 2 principales stratégies de croissance :
6) L’internationalisation
La croissance d’une entreprise peut également reposer sur une stratégie d’internationalisation. Les nouvelles technologies permettent en effet aux entreprises même les plus modestes de commercialiser leurs produits à l’étranger. Des accords de partenariat avec des firmes étrangères permettent également de pénétrer de nouveaux marchés internationaux.
V. L'impact des technologies numériques dans les choix stratégiques
Les impacts des technologies numériques (plateformes et réseaux numériques mondiaux, données massives et intelligence artificielle, etc.) sont pris en compte dans l’élaboration des choix stratégiques. Les nouvelles technologies numériques sont sources d’opportunités et de risques :
- opportunités, car ces technologies permettent aux entreprises d’acquérir davantage d’informations sur leurs marchés, de mieux les stocker et les traiter. Elles offrent de nouvelles possibilités de communication pour les organisations et permettent aux entreprises d’atteindre de nouvelles cibles commerciales. Elles créent également de nouvelles opportunités d’activités (partages de biens meubles ou immeubles, réseaux relationnels, services à la personne…), dans le cadre notamment de l’économie collaborative ;
- risques, car il devient de plus en plus difficile pour une entreprise de protéger ses secrets industriels ou commerciaux, dans un contexte de guerre économique (espionnage…) L’exigence de transparence peut également nécessiter des changements de pratiques difficiles à mettre en œuvre.
#exo
Entraînez-vous
Exemples
Les technologies numériques peuvent favoriser l’inclusion, l’efficacité et l’innovation. Plus de 40 % des adultes en Afrique de l’Est paient leurs factures de services publics par téléphone mobile. En Chine, 8 millions d’entrepreneurs, dont un tiers de femmes, utilisent une plateforme de commerce électronique pour vendre des produits à l’échelle nationale et les exporter vers 120 pays. L’Inde a fourni une identité numérique à caractère unique à près d’un milliard de personnes en 5 ans.