I. L’effet d’un polluant chimique sur la santé
Nous baignons dans un mélange de substances chimiques produites par l’industrie ou provenant de l’agriculture intensive, des transports, des matériaux des bâtiments, des objets de notre quotidien, des produits ménagers et aussi des produits que nous consommons, du tabac aux médicaments en passant par les aliments dont les composants sont altérés par des modes de cuisson agressifs (barbecue, grill, four ou poêle).
Brouillard de pollution au-dessus de Londres
1) La dangerosité d’un polluant
Chaque année, des millions de personnes décèdent prématurément car elles sont exposées aux polluants de l’air ou de l’eau. La dangerosité de tous les polluants n’est cependant pas établie. Des études en cours permettent de mieux cerner les effets de chacun sur l’environnement et la santé humaine. Les procédés de détection, de limitation de leurs rejets et de dépollution évoluent : il est essentiel de continuer à investir dans ce domaine.
L’effet cocktail est connu depuis plusieurs années : un mélange de polluants a des effets beaucoup plus marqués que la somme des effets individuels de chaque polluant.
2) La traçabilité d’une substance
Depuis la révolution industrielle, les activités humaines ont introduit dans les différents compartiments de l’environnement (eau, air, sol) de nombreuses substances plus ou moins toxiques. Elles peuvent être réparties en deux grandes familles :
- les minéraux (traces métalliques telles que les métaux lourds : cadmium, cuivre, plomb, zinc) ;
- les organiques (tels que les hydrocarbures, les composés halogénés, les dioxines, les herbicides, les insecticides).
La pollution aux hydrocarbures peut prendre la forme d’une marée noire
Les métaux et certaines substances organiques peuvent faire l’objet de transferts et d’accumulations à des degrés variables dans les sols, les végétaux (racines, tiges, feuilles, fruits) et la faune du sol (par exemple, vers de terre, escargots, petits mammifères).
Sous forme liquide ou soluble, les polluants peuvent également migrer en profondeur et contaminer les eaux souterraines.
Enfin, sous l’action du vent, les particules fines de sol ou celles issues d’émissions (agricoles, urbaines ou industrielles) et les polluants qu’elles contiennent peuvent se disperser dans l’environnement. Un transfert des éléments minéraux et composés organiques vers les végétaux est alors également possible via les retombées atmosphériques sur les organes aériens.
Il y a donc une contamination des sols par une ou plusieurs substances. Cette contamination sera qualifiée de pollution lorsque les concentrations atteintes dans le sol engendrent un risque pour la santé humaine ou les écosystèmes.
Pour mieux évaluer et maîtriser les dangers et les risques potentiels, il faut donc déterminer les quantités présentes et les flux (retombées atmosphériques et transfert vers les différents compartiments environnementaux) des polluants.
3) La bioaccumulation
Dans les environnements pollués ou naturellement riches en certains toxiques, des espèces vivantes peuvent accumuler ces produits polluants sans nécessairement être affectées. Ce sont souvent des organismes filtreurs (mollusques) ou des champignons. Ils concentrent alors ces polluants, en les métabolisant ou non. Faisant partie de la chaîne alimentaire, ils vont être ingérés par des prédateurs pouvant être affectés par ces substances qui ont alors une concentration plus élevée (de 10 à 1 000 fois) que dans le milieu naturel.
Certains organismes bioaccumulateurs de substances toxiques sont utilisés en tant que bioindicateurs pour l’évaluation biologique de l’environnement :
- les lichens, qui accumulent les polluants, permettent de réaliser une analyse rétrospective de leur exposition aux métaux lourds ou aux radionucléides ;
- la moule zébrée accumule les éléments métalliques dans les canaux ;
- les dauphins concentrent les polluants du milieu marin ;
- les abeilles utilisées à grande échelle en Europe, etc.
II. Exposition
1) L’effet temporel d’une exposition
La conscience des effets de la pollution atmosphérique urbaine sur la santé a beaucoup évolué à la suite du smog présent à Londres entre le 5 et le 9 décembre 1952, qui a recouvert la ville d’un nuage épais de fumées sulfureuses provenant des usines et des chauffages individuels au charbon. Les concentrations de particules en suspension et de dioxyde de soufre (SO2) ont atteint des niveaux de plusieurs milliers de microgrammes par mètre cube (actuellement, ces valeurs sont de l’ordre de la dizaine de µg.m–³ à Paris et à Londres). Une surmortalité exceptionnelle d’environ 12 000 décès en a découlé.
La canicule de 2003 en France a aussi engendré une surmortalité de 15 000 personnes, ce qui a entraîné une prise de conscience de l’opinion et des pouvoirs publics. Les législations spécifiques pour lutter contre la pollution atmosphérique, mises en place à la suite de cette catastrophe, ont imposé une réduction considérable des émissions (dont le SO2) des sources fixes, liée à l’usage de combustibles fossiles.
Malgré tout, la pollution de l’air n’a pas disparu, mais elle a changé de nature : le trafic routier a conduit à une augmentation des concentrations de dioxyde d’azote (NO2), d’ozone et de particules fines en suspension. Néanmoins, les effets sanitaires de ces expositions courantes sont plus difficiles à mettre en évidence.
En zone urbaine, le transport routier constitue la première source de pollution en dioxyde d’azote
Les effets à court terme correspondent à des effets sanitaires qui surviennent de quelques minutes à quelques semaines après une exposition aux polluants. Plusieurs centaines d’études menées dans le monde montrent de manière unanime que l’exposition aux polluants, notamment les particules en suspension et l’ozone, est associée à un impact à court terme sur la santé (notamment sur la mortalité et sur les hospitalisations).
Différents facteurs sont pris en compte pour montrer les impacts sanitaires lors d’expositions chroniques aux polluants atmosphériques : proximité d’une route à fort trafic, niveaux d’expositions mesurés, populations à risque. Les effets à long terme apparaissent clairement sous la forme d’une diminution nette de l’espérance de vie des personnes exposées.
2) La réglementation sur les doses de polluants dans les rejets
L’Union européenne et la France ont développé une réglementation obligeant à effectuer la recherche de polluants dans l’air et l’eau ; elles ont aussi fixé des niveaux de pollution maximaux pour de nombreuses espèces chimiques en s’appuyant sur les travaux de l’OMS (Organisation mondiale de la santé).
Exemple
Dans l’eau, de nombreuses espèces doivent être recherchées, dont : composés organohalogénés, substances et préparations cancérigènes ou mutagènes, hydrocarbures persistants, substances organiques toxiques persistantes et bioaccumulables, cyanures, métaux et leurs composés, produits biocides et phytopharmaceutiques, matières en suspension, substances contribuant à l’eutrophisation (accumulation de nutriments tels que les nitrates et phosphates).
III. L’acidification d’une eau
1) L’acidification d’une solution par ajout de dioxyde de carbone
On prend de l’eau du robinet, on y introduit un peu de bleu de bromothymol : la solution est verte, indiquant que la solution a un pH neutre ou légèrement basique.
On souffle alors avec une paille dans cette solution : elle devient alors jaune, montrant qu’elle devient plus acide à cause du dioxyde de carbone présent dans l’air expiré.
2) L’acidification des océans
L’acidification des océans correspond à la baisse progressive du pH des océans, liée particulièrement aux pollutions humaines. L’océan devient alors de plus en plus acide, ce qui perturbe l’écosystème océanique. Le pH de l’océan a diminué de 0,1 en une centaine d’années.
L’acidification est surtout causée par l’absorption de surplus de CO2 par les océans. Le dioxyde de carbone est massivement produit par les sociétés humaines depuis la révolution industrielle : il a pour conséquence le réchauffement climatique. Cependant, une partie est absorbée par les plantes et les arbres, et un tiers est absorbée par les océans. Le CO2 se dissout progressivement dans l’eau et réduit le pH de l’eau.
Les conséquences sont multiples :
- la principale est la difficulté du plancton océanique à se renouveler : si le pH est trop bas, ces espèces ne parviennent plus à structurer leurs squelettes calcaires et ont du mal à se développer. Or le plancton est à la base de l’écosystème marin car il sert de fondation à la chaîne alimentaire et contribue à l’oxygénation des océans ;
- les coraux sont des animaux à la structure souvent calcaire, ayant du mal à croître en milieu trop acide, ce qui le rend vulnérable, perturbant tout un écosystème de poissons, d’algues et d’organismes endémiques ;
- la biodiversité marine est affectée puisque certaines espèces sont plus fragiles en milieu plus acide, tandis que d’autres auront du mal à trouver leur nourriture…
3) Les pluies acides
Le dioxyde de carbone est une espèce chimique acide, qui participe au couple acide/base CO2, H2O/HCO3−. La réaction avec l’eau s’écrit :
CO2, H2O + H2O → HCO3− + H3O+
Comme précédemment, la solution devient acide.
Le dioxyde de soufre est majoritairement présent sous forme gazeuse, il se transforme en SO3 par réaction avec le dioxygène de l’air et la lumière.
Le trioxyde de soufre SO3 produit de l’acide sulfurique H2SO4 par hydratation avec la vapeur d’eau atmosphérique : SO3 + H2O → H2SO4.
L’acide sulfurique peut réagir avec l’eau, c’est un diacide : H2SO4 + 2 H2O → 2 SO42− + 2 H3O+. De même, le dioxyde d’azote de la pollution atmosphérique forme de l’acide nitrique (HNO3).
Les pluies acides et le milieu aquatique
L’acide sulfurique et l’acide nitrique rendent les pluies acides, dont le pH qui est de l’ordre de 4 peut atteindre 2.
Ces pluies acides acidifient les lacs, faisant disparaître la faune et la flore, détruisent les arbres, attaquent l’acier et le béton : un grand nombre de monuments sont en danger.